DOSSIER 2016/05005 P11325092012 ARRET DU 15 SEPTEMBRE 2016 c/ AP LTD (IOUR DE PARIS 7 DEUXIEME CHAMBRE DE A 3, 15 pages) La Chambre de l'instrucunn de PARIS, reunjc cn audience en du cunseil du us 2016. a 15 present um?! un audxence en chambrc du conscil 1e 15 2016 PERSONJE EN EXAMEN WORLDPAY AP LTD, represcnlec par Neil Dmnicilic' Mc CHEMLA Denis, 52 Avenue anhc 75008 PARIS Librc en vertu d'unc oldunnance de placement Sous comm: judiciairc cn dulc < WORLDPAY (STE), Ayant pour avocats Me HAMELLE, 52 avenue Huchc 75008 PARIS Me A, 52 Avenue Iluche 75008 PARIS ('oviwsrrioN DE LA COUR Lars des delmts, du delihere et du pronunce de l'arrei: Mme Plesidcnt Mme Conseillel Conseiller, Tons trois designes an application dos dispositions dc l'articlc 191 du Code the procedurc penale, GREFFIER 101's des debali e! (in pronouce' Mm: RUVEL PUBLIC lors des dc'buts M. MACKOWIACK, Avocat general cl lors du prononce M. ,IVh'l'. Avocat general RAPPEL DE LA Le 21 Juillel 2016, les jugca du Tribunal de Grands mimics dc PARIS, out rendu unc ordonnance dc placement sous conlrelcjudiciaixe. Luditc urdunnance a ete notifiec, [0 meme jour, par rccommandee: 1" a permnne mise en examen son uvucal Le 22 juillct 201s, appcl dc can: a em' imerjete par Maitre BENGUIGUI bstitunut Maitre CHEMLA, avacat de la pcrsonnc misc cu cxnmen ct enregistre an grel'fe du ihunnl de Granule Instance dz Confomm'mcm aux dispositions dos articles 194 31197 du Cod: dc proce'dure penale Ie Pl'ocureur genera] 1D 7 a nuiifie, 1c 24 1101312016 a) ?1 12 personne mise en examen b) à son avocat 0) aux parties c1v1les et à leurs avocats la date à laquelle l'affaire sera appelée à l'audience 2 ° — a déposé le même jour le dossier au greffe de la chambre de l’instruction, où il a été tenu àla disposition de l'avocat de la personne mise en examen et des parties civiles 3 ° - a versé au dossier ses réquisitions écrites en date du 29 août 2016 Conformément aux dispositions de l’article 198 du Code de procédure pénale, Maître CHEMLA, avocat de WORLDPAY AP LTD, personne mise en examen, a déposé le 5 septembre 2016, au Greffe de la Chambre de l’instruction, un mémoire visé par le Greffier, communiqué au Ministère public et classé au dossier ; Conformément aux dispositions de l’article 198 du Code de procédure pénale. Maître BA. avocat de LANDREAU Gérard, partie civile, a transnns par téléc0p1e le 2 septembre 2016. au Grelte de la Chambre de l’mstruct10n, un mémoire visé par le Greffier. conm1unrqué au Ministère puth et classé au dossier : Josiane CHAT, partie civile, a transmis par télécopie le 6 septembre 2016, au Greffe de la Chambre de l’instruction, un mémoire visé par le Greffier, communiqué au Ministère public et classé au dossier ; DÉBATS Ont été entendus : Mme THOMAS, Conseiller, en son rapport M. MACKOWIAK, Avocat général, en ses réquisitions Maître BENGUÏGUI substituant Maître CHEMLA, {avocat de WORLDPAY AP LTD, personne mise en examen, qui a eu la parole en dernier. Maître DESCOINS, avocat de NEVEUX Michel, partie civile, en ses observations ; Maître GOLDBLUM substituant Maître ALONSO, avocat de WEISTROFFER Philippe, partie civile, en ses observations ; Maître PHAN substituant Maître F ERON-POLINÏ, avocat de REQUI Christophe, DOS SANTOS Patrick, CASASNOVAS J eau-Claude, parties civiles, en ses observations ; Maître DONAT, avocat de NAMIAS Jacques, partie civile, en ses observations ; Les autres avocats, bien que régulièrement avisés dela date d’audience, ne se sont pas présentés. A l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré au 15 septembre 2016. @@ Prise après en avoir délibéré conformément à l’article 200 du code de procédure pénale. EN LA FORME Considérant que cet appel, régulier en la forme, a été inter] été dans le délai de l'article 186 du code de procédure pénale ; qu‘il est donc recevable ; Considérant que le mémoire de Josiane CHAT, partie civile, reçu au greffe de la chambre de l’instruction le 6 septembre 2016 par télécopie, doit être déclaré irrecevable, l’article 198 du code de procédure pénale disposant que les mémoires sont déposés au greffe de la chambre de l’instruction et ne prévoyant que pour l’avocat la faculté d’adresser le mémoire par télécopie, si celui-ci n’exerce pas dans la ville où siège la chambre de l’instruction ; AU FOND La société WORLDPAY AP Ltd a été mise en examen le 10 juin 2016 des chefs de complicité d’exercice illégal de l’activité de prestataire de service de paiement, pour avoir, au Royaume-Uni. en France et aux Pays-Bas, du 14 décembre 201 I au 27 juin 2014. été complice de l’exercice illégal de l’activité de prestataire de service de paiement commis par SEROPH Holding BV. en foumissant des prestations de service de paiement à cette société prestataire de service de paiement qui n’était pas agréée en Europe alors qu’elle aurait dû l’être, pour un montant de 16,820 millions d’euros, dans les circonstances suivantes : À compter de l'année 201 1, plusieurs personnes étaient démarchées via internet et par téléphone par plusieurs sociétés de brokers, les sociétés BFOREX, ASTON MARKETS, FXGM et 4XP. Au cours de ces démarchages, les traders garantissaient à leurs clients un rendement de l'ordre de 20 à 30 %, voire même un rendement garanti à 88 %, de nombreux cadeaux et bonus. D'après plusieurs plaignants, ces démarchages étaient parfois agressifs et surtout incessants. Toutefois, même si cette pratique semblait commune à toutes les sociétés, le mode opératoire des trades et surtout la façon dont les fonds étaient perdus était différente selon les structures. Les modes opératoires s’établissaient comme Suit : a) chez BFOREX : Au sein de cette société trois pratiques existaient. La première concernait les comptes de trade gérés par les clients eux—mêmes. Sur ces comptes, les clients passaient eux-mêmes leurs ordres, mais les ordres étaient pour certains clients passés sur les conseils d‘un des traders de la société. Dans un premier temps, les conseils s'avéraient fructueux et amenaient les victimes à avoir confiance dans le système et donc à déposer plus de fonds. C‘était souvent lors de ces nouveaux dépôts que les conseils du trader se révélaient moins efficaces et que les comptes des victimes chutaient en-dessous de la valeur investie, ce qui facilitait les demandes, toujours appuyées d'une mise en confiance de la part du trader, pour de nouveaux dépôts pour soi disant « se refaire ». Certaines victimes effectuaient à nouveau des dépôts mais voyaient toujours leurs comptes diminuer. D'autres opérations de trade pouvaient remettre en cause l‘intégrité des traders de la société BFOREX. En effet, il était constaté que dans certains cas, lorsque les victimes tradaient par elles—mêmes et que leur compte connaissait de bons résultats, des opérations étaient passées par un trader de la société, qui faisaient systématiquement connaître des pertes aux comptes en question. La troisième méthode consistait à faire diminuer le compte lorsque les victimes voulaient effectuer des retraits, que ce soit dans le cas où le compte était géré par le client lui-même ou lorsque le compte était géré par un trader de la société. Dans ce processus, il était relevé que les jours suivant la demande de retrait, des ordres étaient passés sur les comptes des victimes, qui voyaient leur compte se trouver alors dans une position perdante. Les victimes affirmaient ne pas être à l‘origine de l'opération, ni avoir donné des instructions en ce sens. Néanmoins, il ressortait de tous ces cas que lorsque les comptes devenaient perdants et que les victimes venaient se plaindre et réclamer leurs fonds, plus aucun contact n'était possible avec leurs interlocuteurs ou même avec la société. 8 “V b) chez ASTON INVEST : Dans les opérations relevées avec cette société, l’opération suspecte la plus fréquente était le fait que la société ASTON INVEST prélevait sur les comptes bancaires des victimes des sommes pour lesquelles elles n’avaient au préalable pas donné leur accord. La société refusait également de verser les fonds encore présents sur les comptes de trade des victimes sous divers prétextes. Pour effectuer les retraits illicites, la société utilisait les coordonnées dela carte bancaire communiquées par les victimes lors de leurs premiers dépôts. Les opérations en question étaient toutes effectuées au bénéfice d'un site internet, ebinnaires.com. Ce site semblait être également rattaché à la société ASTON INVEST. Une autre pratique était constatée, à savoir que lorsque certaines victimes, mécontentes de la société, postaient sur des forums leurs mésaventures et déconseillaient vivement de trader avec ce broker, la société ASTON INVEST, pour contrer cette mauvaise publicité, faisait intervenir un avocat français, Me David CASTEL, pour rédiger des accords transactionnels entre la société et les victimes. Dans le cadre de ces accords, les victimes s'engageaient à retirer et ne plus poster de commentaires dénigrant la société ASTON INVEST et à ne pas déposer plainte contre elle en contrepartie du remboursement d'une partie de leurs pertes. La plupart des victimes acceptaient de transiger mais ne se voyaient rembourser que partiellement de leur préjudice, en moyenne à peine un tiers de la somme investie étant remboursée. 0) chez 4XP : Lors de la réception de plaintes de certaines victimes, il était remis des contrats de gestion entre les victimes et des gestionnaires de comptes dont les coordonnées étaient françaises. Après avoir contacté et auditionné ces gestionnaires de comptes, il apparaissait aux enquêteurs que la plupart d'entre eux n'étaient pas des professionnels du trading mais des particuliers à qui la société 4XP avait fait miroiter une commission de rendement de 30 % sur les comptes que ces « traders » avaient en portefeuille. Mais dans la plupart des cas, ces commissions étaient versées sur leur compte de trade et donc restaient purement virtuelles même si certains avaient réussi à percevoir des virements de la part de la société. * " ' Toutes ces personnes, que ce soit les traders ou les victimes, n‘étaient jamais en relation physique avec un intervenant de la société 4XP. Seuls des contacts par mail ou téléphone les mettaient en relation avec les commerciaux ou différents « directeurs » de la société 4XP. Les traders d'ailleurs avaient été dans un premier temps des clients de la société, qui, soi—disant grâce à leurs performances sur leur compte de trade, aVaient attiré l'attention de la société 4XP qui voulait leur donner des responsabilités et leur faireconfiance pour faire gagner d'autres clients. Ces clients devenaient traders pour la société sans avoir réellement pris connaissance des contrats qu'ils signaient. Ainsi, dans certaines sociétés, aucun contrat de gestionnaire de compte n’était signé entre le broker et le client ou entre le gestionnaire de compte et le client. Les victimes ne savaient pas comment les sociétés de trading venaient à les contacter, elles étaient de très nombreuses fois sollicitées par téléphone pour ouvrir le compte et lorsque les comptes connaissaient des pertes, les brokers étaient injoignables. Les sociétés étaient basées dans les paradis fiscaux et dans la plupart des cas, ne semblaient pas être régulées. Les comptes bancaires étaient également situés à l'étranger et les lignes téléphoniques, qui pourtant avaient un identifiant français étaient louées à des sociétés de téléphonies étrangères qui elles-mêmes sous-louaient les lignes, ce qui rendait l'identification des utilisateurs finaux très compliquée. Néanmoins, des liens pouvaient être faits entre ces structures qui en apparence n'avaient aucun lien. a) Les liens entre BFOREX et FXGM : Les constatations effectuées sur des mails échangés entre les victimes et des traders de la société BFOREX amenaient à constater que ces mails semblaient provenir simultanément de la société F XGM et de la société BFOREX. Un mail de Jonathan BRENNER indiquait que la société FXGM était la société mère de la société BFOREX. De plus, le site internet bforex.com n'était plus accessible et renvoyait au site fxgm.com. Les enquêteurs tentaient également de prendre contact avec la société BFOREX et notamment avec Pierre COURTIN qui avait soi-disant été licencié de la société. Cependant, le répondeur les mettait en relation avec la société BFOREX, et leur proposait d'être mis en relation avec Pierre COURTIN. Leur interlocuteur leur expliquait que Pierre COURTIN n'était pas joignable et prenait leurs coordonnées en leur 9NV indiquant que Pierre COURTIN les rappellerait. Pourtant, c’était Stéphane LACOUR de la société FXGM qui rappelait. Interrogé sur les liens entre les deux sociétés, ce dernier maintenait qu'il n'existait aucun lien entre les deux sociétés et indiquait aux enquêteurs ne pas être en mesure de fournir des explications. Stéphane LACOUR mettait en avant le sérieux de la société et surtout le fait que la société était légale et régulée. Invité à fournir les coordonnées des enquêteurs à un des responsables de la société, ce dernier s'engageait à recontacter ces derniers très rapidement mais ne donnait pas suite. Il apparaissait également, que dans un courrier adressé à l'AMF, la société FXGM contestait tout lien avec la société BFOREX ce qui pourtant contredisait les différentes constatations des enquêteurs. Il était également relevé dans une réponse à réquisition que la société BFOREX utilisait le numéro intra-communautsire de la société FXGM pour effectuer des transactions commerciales avec ses lburnisscurs. Il paraissait donc plus qu'évident que les deux sociétés étaient liées. b) Des liens entre BF OREX et ASTON MARKETS étaient également constatés : la société BFOREX et ASTON MARKETS avaient une adresse postale similaire à Londres, à savoir le 788-790 F inchley Road. Cette adresse se rét-*élait n'être qu'une simple boîte postale en ce qui concerne la société BFOREX. De même, il était constaté qu'un avocat du barreau de Paris apparaissait au cours des deux procédures, à savoir Me David CASTEL. Entendu, ce dernier prétextait ne pas connaître la société BFOREX ni les divers protagonistes de ce dossier. Il admettait cependant avoir agi pour le compte de la société ASTON MARKETS dans trois dossiers pour organiser des accords transactionnels. De même, une autre structure semblait être commune, à savoir la société France Offshore. Cette société était apparue dans la procédure concernant la société BFOREX lors de l'audition de David CASTEL. Au cours de cette audition, Me CASTEL avait expliqué que le sceau, présent sur les documents pouvant appartenir à une société détentrice du site internet bforex-trading.fr , avait certainement été apposé par la société France Offshore pour laquelle il réalisait certains actes. La société France Offshore était identifiée comme servant à créer des sociétés dans les paradis fiscaux en vue de faire de la défiscalisation. Cette société faisait l'obj et d'une information judiciaire dont l'enquête était confiée à la DNTFF. La présence de cette structure dans les deux procédures amenait à penser que les montages juridiques, ainsi que techniques (téléphonies, sites internets, juridiques) avaient été faits par cette soc1été et que les protagonistes dissimulés par les montages avaient été en relat10n avec cette somété. c) Les liens entre 4XP et ASTON MARKETS Il apparaissait que le compte bancaire de la société 4XP était tenu à la TBC Bank code Swift TBCBGE228SO. Ce code Swift correspondait à celui communiqué par la société ASTON MARKETS à ses clients. Même si le compte LBAN n'était pas le même, la probabilité pour que deux sociétés, ayant la même activité et faisant l'obj et d‘une enquête, possèdent un compte bancaire dans la même banque à l'étranger et dans la même ville était très faible. d) Les autres liens entre les sociétés Il apparaissait que des clients étaient communs aux diverses structures : des clients d'abord contactés par BFOREX ou FXGM étaient par la suite contactés par les sociétés ASTON MARKETS puis après avoir connu les mêmes résultats que chez les deux premiers brokers, ils étaient contactés par la société CFX MARKETS. Cette succession de contacts par les sociétés paraissait n’être dû qu'à un montage en vue d'escroquer les victimes à travers une multitude d'entités, en apparence, différentes. Seul un préjudice provisoire pouvait être évalué. En effet, un grand nombre de victimes ne se faisait pas connaître, pensant ne pas avoir de recours contre ces sociétés. Pourtant les forums sur le sujet faisaient apparaître de nombreuses victimes. Egalement, certaines victimes ne pouvaient être jointes, car les informations fournies par l'AMF, qui centralisait le recueil de plaintes, n‘étaient pas complètes et ne permettaient pas d'entrer en relation avec elles. 1 0 K" Néanmoins, le préjudice pouvait être évalué au début de l'enquête de la façon suivante : - pour la société BFOREX, avec seulement 8 victimes contactées ,un préjudice de 170 818,38 € ; - pour la société FXGM, avec seulement deux victimes, un préjudice del 7 600 € ; — pour la société ASTON MARKETS, avec 20 victimes contactées, 321 693,23 € de préjudice mais sur cette somme, 66 000 € étaient récupérés par des victimes qui avaient menacé de déposer plainte contre la société ; — pour la société CFX MARKETS, seule une seule victime était connue. l'enq uëte sur cette société n‘ayant commencée que suite à l'audition de Colette ARMBRUSTER qui perdait 2 500 € avec cette société ; - pour le société 4XP, sur les cinq victimes connues, quatre victimes chiffraient leur préjudice, ce qui permettait de l'estimer au total à 129 000 €. Au total, les cinq sociétés totalisaient un préjudice provisoire connu de 639 811,61 €. En outre, pour la période du 29 juillet 2013 au 12 septembre 2013, TRACFIN référençait des virements ou tentatives de virements réalisés par des particuliers résidant en France à destination des comptes d'ASTON INVES'I’. Il apparaissait ainsi que la société était titulaire d'un compte àla TBC Bank de Tbilissi (Géorgiel et d‘un com ptc a la Barclays Bank aux Seychelles. Le bénéficiaire effectif et titulaire des comptes etait identifié comme étant Yigal Felix HADDAD. Par réquisitoire introductif du 21 janvier 2014, une information judiciaire était ouverte contre X des chefs de démarchage financrer 1111cite, fourmture de service d'investissements sans agrément et d'escroquerie en bande orgamsée. En définitive, il apparaissait qu’aucune transaction réelle n’avait j amais été passée suite au versement de fonds par les clients. Les encaissements sur les comptes suisses de la société BFOREX se chiffraient a environ 4 millions de US$ outre environ 3 millions d’euros, laissant penser que le préjudice causé par cette société atteignait au moins ces montants. Cette société avait exercé sur le territoire français au moinsjusqu’en 2013 et pouvait avoir eu entre 800 et l 000 clients français. Son activité sur le territoire français étaient interdite par l‘Al\le_ __ en2010.** ** ** ** * " *‘ * * Des interpellations et mises en examen intervenaient à compter du mois d’octobre 2014. L’enquête faisait apparaître que la société WORLDPAY était amenée à encaisser des virements provenant de victimes d'escroqueries au Forex, commises notamment au moyen des sociétés ASTON FOREX, ASTON MARKET et 4XP. Trois comptes WORLDPAY avaient manifestement été utilisés : deux comptes NATWliS’I’ BANK a Londres et un compte RBS France. Le 28 janvier 2015, la société WORLDPAY AP Ltd déclarait se constituer partie civile. Hntenrlue le 24 février 2015, la représentante de la société déclarait que WORLDPAY était un groupe de sociétés s’occupant de différents types de paiement a travers différents pays, en fournissant les services de techno lo gie nécessaires. essentiel lement pour les paiements par cartes de crédit et cartes de débit, son rôle consistant à faire le lien entre les sites marchands et le service de paiement par carte. Elle était détentrice d'une licence avec VlSA et MASTERCARD. Au Royaume-Uni, elle indiquait procéder à 45 % de tous les paiements par cartes de crédit ou de débit, s’agissant des paiements en magasins ou en ligne. WORLDPAY AP était issue d’une société rachetée en 20H par le groupe, la société ENVOY SERVICES Ltd. Dans le groupe. WORLDPAY AP était l’une des sociétés opérationnelles pour le monde entier sauf les Etats-Unis. Elle était régulée par la FCA. Sur les encaissements suspects, la représentante de la société exposait les faits suivants :au début de la relation, ENVOY SERVICES Ltd avait un contrat avec la société israélienne CHARGE IT Ltd. Fin 201 1, le contrat était transféré sur une société hollandaise, SEROPH Holdings BV. Le nom commercial utilisé demeurait ALLCHARGE. La société WORLDPAY AP recevait les paiements avec la référence commençant par AC qui désignait le bénéficiaire comme étant ALLCl-ÏARGE mais ignorait qui était le marchand final et exécutait ensuite les instructions de ALLCl—IARGE. qui consistaient à 95 % en demande de transfert des fonds à cette société et parfois en demande de transfert à des particuliers. Elle était dans l’incapacité de savoir à qui profitaient finalement les paiements effectués à ALLCHARGE. La société était amenée à Signaler àla SOCA britannique des opérations suspectes en lien avec les paiements ALLCHARGE destinés notamment à une société MC MARKET qui se disait régulée en Angleterre alors que cela n’était pas vrai. La représentante de la société affirmait avoir procédé à des contrôles de la société CHARGE IT puis de la société SEROPH, en vérifiant les propriétaires, les administrateurs, le mode de fonctionnement et les bénéficiaires effectifs. Suite à cette audition, la société WORLDPAY AP Ltd faisait parvenir divers documents sollicités par les juges d’instruction (D 477 à D 516). Le 6 janvier 2016, la société WORLDPAY AP Ltd était placée sous le statut de témoin assisté. lnterrogée par les juges d’instruction, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) était d’avis, d’une part que la société SEROPH BV devait détenir un agrément des autorités hollandaises à compter du l"r novembre 2009 pour fournir des prestations de service de paiement et, d’autre part, que la société WORLDPAY AP Ltd, société de prestation de service de paiement, soumise à la seule réglementa- tion de son pays d’origine, la Grande Bretagne, en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux, devait, au regard de l’article 8 de la 3°“’—" directive, identifier et vérifier l’identité de ses clients et obtenir des informations sur l’objet et la nature de la relation d’affaires. Elle devait également s’enquérir de l’activité et le cas échéant de l’agrément exigé par le droit de l’Union européenne pour fournir des services de paiement au sein de l’UE, dès lors que la société SEROPH s’était présentée comme un prestataire de service de paiement. Mais la société WORLDPAY ne se trouvait pas dans l’obligation de recueillir des informations sur les clients de SEROPH. Le 20 mai 2016, la société SEROPH Holding BV, déjà placée sous le statut de témoin assisté, était mise en examen pour les infractions de blanchiment d’escroqueries en bande organisée, exercice illégal de l’activité de prestataire de service de paiement et complicité d’exercice illégal de l’activité de prestataire de ' ”service d’investissement commis par les Sociétés FOREX PLACE Ltd, ASTON INVEST Ltd, BFOREX Ltd, FXGM Ltd et lNVEST CAPITAL MARKET Ltd. Le 10 juin 2016, la société WORLDPAY AP Ltd était à son tour mise en examen du chef de complicité d’exercice illégal de l’activité de prestataire de serviCe de paiement et maintenue sous le statut de témoin assisté pour les infractions de complicité d’exercice illégal de l’activité de prestataire de service d’investissement, de complicité d’escroqueries en bande organisée et de blanchiment d’escroquerie. Son représentant exposait que les vérifications qui avaient pu être faites sur les sites marchands clients de SEROPH n’étaient que “de premier niveau” et n’avaient en particulier pas été jusqu’à s’assurer qu’ils ne figuraient pas sur les “black lists” des régulateurs. La mise en examen était limitée aux seuls paiements effectués par la société WORLDPAY AP Ltd àla société SEROPH et destinés aux seuls sites marchands entrant dans le périmètre de l’information, soit BFOREX, ASTON et 4XP, ce qui représentait un montant de 16 820 741,54 euros entre le ]"r janvier 2012 et le 30juin 2014. L’information se poursuit. *** La société WORLDPAY AP Ltd a perçu en 2013 un bénéfice avant taxes de 4 323 000 £ et après impôt de 3 173 000 £. En 2014, elle a perçu un bénéfice avant taxes de 13 059 000 £ et après impôt de 10 389 000 £. La société est détenue à 100 % par WORLDPAY GROUP Plc qui a été introduit en bourse en octobre 2015, dont 58 % des actions sont sur le marché, le reste étant détenu par deux fonds d’investissement. En 2015, le profit du groupe avant impôts était de 26,02 millions d’euros *** 12 Par ordonnance du 21 juillet 2016, les juges d’instruction ont : - placé la société WORLDPAY AP Ltd sous contrôle judiciaire, avec l’obligation suivante : -Art. 138 1 1°- Verser entre les mains du régisseur du tribunal de grande instance de Paris la somme de 1 000 000 euros (un million d’euros) en un versement qui sera effectué avant le 20 septembre 2016 ce cautionnement garantissant. A) à concurrence de 10 000 euros la représentation à tous les actes de la procédure ainsi que l’exécution des autres obligations prévues dans la présente ordonnance, B) a concurrence de 990 000 euros le paiement de la réparation des dommages causés par l’infraction et des amendes. La société WORLDPAY AP Ltd a régulièrement intte eté appel de cette ordonnance. Par mémoire de son avocat déposé au greffe le 5 septembre 2016, la société WORLDPAY AP Ltd demande àla chambre de l’instruction : - à titre principal, de constater que le cautionnement n’est ni nécessaire, ni proportionné, ni fondé dans son principe, — à titre subsidiaire, de constater que le montant du cautionnement n’est pas justifié, - en tout état de cause, en conséquence, d’infirmer l’ordonnance entreprise et d’annuler le cautionnement imposé par l’ordonnance déférée. La société WORLDPAY AP Ltd fait valoir que : - le cautionnement n’est pas nécessaire pour garantir sa représentation : elle s’est spontanément présentée aux juges d’instruction, a systématiquement répondu aux convocations, a fait montre d’une transparence totale et d’une incontestable volonté de coopération, - elle ne saurait échapper aux effets d’une condamnation française, même si elle est une société de droit anglais, en vertu des accords de coopération judiciaire liant les Etats membres de l’Union européenne, des mesures de saisie ou de confiscation qui seraient parfaitement exécutables sur le territoire du Royaume Uni et du risque de sanction disciplinaire de la part de la FCA et de remise en cause de son autorisation d’exerëef’en France, - une garantie de paiement n’est pas davantage nécessaire, dès lors qu’elle est une société florissante et que sa dissolution volontaire n’est pas envisageable, en particulier parce que l’hypothèse de sa fusion dans une autre société serait lourd de conséquences et menacerait la continuité même de ses activités en remettant ' en causé les autorisations d’exercer dont elle bénéficie, - le cautionnement doit être proportionné au montant susceptible d’être réclamé au mis en examen s’il venait à être condamné, au titre de la réparation et des amendes, — sur les dommages, il n’y a aucun lien de causalité entre les dommages allégués et le caractère licite ou illicite de l’activité de prestataire de service de paiement : les plaignants prétendent être victimes de démarchage illicite et d’une escroquerie mais elle-même n’a entretenu aucun rapport avec les prétendus courtiers non régulés et ne saurait être associée à l’escroquerie en bande organisée ou aux activités illégales de services d’investissement ; le caractère licite ou illicite de l’activité exercée par SEROPH BV n’a aucun rapport avec la perte subie par les investisseurs ; le caractère prétendument illicite de l’activité de SEROPH dont elle est suspectée d’avoir été complice ne peut en aucun cas constituer un événement causal du préjudice subi par les plaignants ; elle est parfaitement étrangère au schéma de fiaude, - nombre de personnes se disant victimes des sites de courtage en ligne visés par l’information ont d’ores et déjà choisi la voie civile pour obtenir réparation et ces demandeurs ne peuvent plus saisir les tribunaux répressifs en vertu de l’adage electa una via, — elle rappelle que nonobstant sa mise en examen, elle conserve le statut de partie civile et subit un préjudice actuel, réel et certain peu compatible avec l’obligation de verser un cautionnement, - sur l’amende, compte tenu de l’absence de condamnation intervenue à ce jour au visa de l’article L. 572-5 du code monétaire et financier, du fait qu’elle n’a pas rendu le moindre service de paiement sur le territoire français, qu’elle s’est efforcée de coopérer à l’information et qu’elle n’ a jamais été condamnée ni en France ni au Royaume Uni, il serait pour le moins inique et peu compréhensible au regard des pratiques judiciaires françaises qu’ une peine d’ amende qui ne soit pas entièrement assortie du sursis ou purement symbolique ne soit pas prononcée à son encontre, - il n’y a pas d’indices graves ou concordants susceptibles de soutenir sa mise en examen et par suite, une obligation de verser un cautionnement : il n’y a pas d’élément matériel de complicité, pas d’intention 13 {(V criminelle et la procédure n’a pas révélé d’indice d’actes répréhensibles qui lui seraient imputables. Par mémoire de son avocat faxé au greffe le 2 septembre 2016, Gérard LANDREAU, partie civile, demande à la chambre de l’instruction de constater l’importance du préjudice qu’il a subi suite aux agissements des mis en examen et de lui donner acte qu’il laisse le soin à la chambre de l’instruction d’apprécier l’opportunité de faire droit ou non à la demande de la société WORLDPAY AP Ltd. Par écritures faxées au greffe le 6 septembre 2016, Josiane CHAT, partie civile, sollicite la condamnation de la société WORLDPAY AP Ltd à lui payer la somme de 27 352 euros en réparation de son préjudice matériel et celle de 2 000 euros en réparation de son préjudice moral. Par réquisitoire du 29 août 2016, le procureur général requiert qu’il plaise à la cour, en la forme, déclarer l’appel recevable et, au fond, confirmer l’ordonnance entreprise, pour les motifs qu’elle contient. SUR CE, LA COUR, Considérant que la société WORLDPAY AP Ltd a été mise en examen le 10 juin 2016 du chef de complicité d’exercice illégal de l’activité de prestataire de service de paiement, infraction sanctionnée par une peine d’emprisonnement correctionnel ; qu’il résulte suffisamment de l’exposé du dossier des éléments rendant vraisemblable l’implication de la société en cause dans les faits dont le juge d’instruction est saisi et pour lesquels celle-ci a été mise en examen ; que les considérations tenant à l’absence d’indices graves ou concordants soutenant sa mise en examen sont étrangères à l’unique objet de l’appel, qui porte exclusivement sur le contrôle judiciaire ; Considérant qu’il résulte de l’article 706—45 du code de procédure pénale que le juge d’instruction peut placer la personne morale sous contrôle judiciaire dans les conditions prévues aux articles 139 et 140 en la soumettant à diverses obligations limitativement énumérées, parmi lesquelles le dépôt d’un cautionnement dont le montant et les délais de versement, en une ou plusieurs fois, sont fixés par le juge d’instruction ; Considérant que le contrôle judiciaire de la société WORLDPAY AP Ltd s’impose en raison des nécessités de l’instruction et à titre de mesure de sûreté, afin de garantir la représentation de cette société de droit anglais devant la justice française ainsi que, le cas échéant, l’exécution du jugement ; qu’en effet, la société conteste toute implication dans les faits reprochés et estime en être uniquement victime, ne s’étant spontanément rapprochée du juge d’instruction qu’en qualité de partie civile ; qu’ensuite, cette société, filiale d’un groupe important, n’a pas la maîtrise des décisions la concernant ; qu’enfin, la récente décision du Royaume-Uni de quitter l’Union européenne est susceptible d’entraîner des modifications dans la coopération judiciaire avec ce pays ; Considérant que selon l’article 138 11° du code de procédure pénale, le montant et les délais de versement du cautionnement sont fixés compte tenu notamment des ressources et charges de la personne mise en examen ; que la société WORLDPAY AP Ltd, qui se décrit elle—même comme florissante, a réalisé en 2014, dernier chiffre disponible, un bénéfice net de plus de 10 millions de livres sterling, soit de l’ordre de 12,5 millions d’euros ; qu’elle dépend d’un groupe de sociétés coté en bourse et détenu pour partie par deux fonds de pension ; Qu’ainsi, le montant d’un million d’euros payable en un versement fixé pour le cautionnement apparaît proportronné aux facultés de la personne mise en examen ; Que ce montant d’un million d’euros apparaît également proportionné aux objectifs assignés au cautionnement ; qu’en effet, d’une part, le préjudice recensé en l’état dans la procédure se compte en millions d’euros et il est suffisant à ce stade de constater que les faits reprochés à la société WORLDPAY AP Ltd sont susceptibles d’avoir concouru à la réalisation de ce préjudice ; que d’autre part, l’amende encourue au titre de l’infraction notifiée lors de la mise en examen s’élève pour une personne morale à 1 875 000 euros et il n’y a pas lieu de spéculer sur la sanction qui pourrait être prononcée par une juridiction de jugement ; 14 SQL Qu’en conséquence, l’ordonnance déférée doit être confirmée ; Qu’en application de l’article 142 du code de procédure pénale, la cour estime devoir affecter le cautionnement selon les modalités précisées au dispositif ; PAR CES MOTIFS LA COUR Vu les articles 122, 123, 135, 137 à 148—2, 148—4, 179, 183, 185, 186, 194, 197, 198, 199, 200,207, 209, 216, 217, 502, 503 du Code de procédure pénale. EN LA FORME DÉCLARE L'APPEL RECEVABLE DÉCLARE IRRECEVABLE le mémoire de Josiane CHAT AUFOND DIT L’APPEL MAL FONDÉ CONFIRME L'ORDONNANCE ENTREPRISE DIT que le cautionnement d’un million d’euros mis à la charge dela société WORLDPAY AP Ltd garantit ’ ’” 1° à concurrence de 3110 000 euros la représentation de la personne mise en examen à tous les actes de la procédure et pour l‘exécution du jugement ; 2° à concurrence de 700 000 euros le paiement dans l’ordre suivant : a) de la réparation des dommages causés par l’in fraction, h) des amendes. ORDONNE que le présent arrêt sera exécuté à la diligence de Mme la Procureure générale ; LE GREFFIER LE PR? ENT “.::“..FÜRMÈ POUR COPlE CERTIFiÉE 1_, __ _ l\ Le Greffier DOSSIER N° 2016/05005 “\ ‘?-Qlî C/ WORLDPAY AP LTD a\,\ / 15