La Commission des sanctions COMMISSION DES SANCTIONS Décision n° 6 du 25 juin 2018 Procédure n°16/15 Décision n° 6 Personne mise en cause : IG MARKETS LIMITED UK company n° 04008957 Dont le siège social est situé Cannon Bridge House, 25 Dowgate Hill, London EC4R 2YA et ayant une succursale en France située 17, avenue George V, 75008 Paris Prise en la personne de son représentant légal Ayant élu domicile au cabinet d’avocats Spitz et Poulle Kannan, 18, boulevard de la Tour-Maubourg, 75007 Paris. La 1 ère section de la Commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers (ci-après « AMF ») : Vu le règlement (UE) n°596/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 sur les abus de marchés, notamment ses articles 3.1, § 34 et 35 ; Vu la directive 2014/65/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 concernant les marchés d’instruments financiers et modifiant la directive 2002/92/CE et la directive 2011/61/UE, et notamment ses articles 4.1.7, 24.3 et 24.4 ; Vu le règlement délégué n° 2016/958 de la Commission du 9 mars 2016 complétant le règlement (UE) n°596/2014 du Parlement européen et du Conseil par des normes techniques de réglementation définissant les modalités techniques de présentation objective de recommandations d’investissement ou d’autres informations recommandant ou suggérant une stratégie d’investissement et la communication d’intérêts particuliers ou de l’existence de conflits d’intérêts, notamment ses articles 2, 5, 6 et 8 ; Vu le règlement délégué (UE) 2017/565 de la Commission du 25 avril 2016 complétant la directive 2014/65/UE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les exigences organisationnelles et les conditions d’exercice applicables aux entreprises d’investissement et la définition de certains termes aux fins de ladite directive, notamment ses articles 55.1, 55.3 et 56.1 ; Vu le code monétaire et financier, notamment ses articles L. 531-2, L. 533-1, L. 533-12, L. 544-1 et D. 321-1 ; Vu le règlement général de l’AMF, notamment ses articles 143-3, 314-10, 314-18, 314-49, 314-51, 314-53, 315-2, 315-5, 315-6, 315-7, 315-8 et 315-13 ; 17 place de la Bourse – 75082 Paris cedex 2 – tél. 01 53 45 60 00 – fax 01 53 45 63 20 www.amf-france.org -2- Après avoir entendu au cours de la séance publique du 23 mai 2018 : − − − − M. Bernard Field en son rapport ; Mme Natalie Verne, représentant la directrice générale du Trésor, qui a indiqué ne pas avoir d’observations à formuler ; M. Xavier Jalain, représentant le Collège de l’AMF ; La société IG Markets Limited, représentée par M. Arnaud Poutier, directeur des succursales France et Luxembourg, et assistée par Mes Jean-Baptiste Poulle, Arut Kannan et Mathieu Françon, avocats au sein du cabinet Spitz Poulle Kannan. La personne mise en cause ayant eu la parole en dernier. FAITS La société IG Markets Limited (ci-après « IG »), prestataire de services d’investissement de droit britannique, est la filiale d’IG Group Holdings PLC, société mère du groupe IG créée en 1974 qui est cotée sur le London Stock Exchange. Le groupe exerce son activité dans plus de quinze pays, compte environ 1 500 salariés dans le monde et se présente comme le leader mondial sur le marché des contrats sur la différence (en anglais « contracts for difference », ci-après « CFD ») dont il a traité un volume d’ordres de près de 73 millions entre juillet 2014 et juin 2015. En vertu du passeport européen, IG a ouvert une succursale à Paris en 2007 par l’intermédiaire de laquelle elle est autorisée à exercer en libre établissement plusieurs activités dont la réception transmission et l’exécution d’ordres pour compte de tiers, la négociation pour compte propre, le conseil en investissement, les services de change liés à la fourniture de services d’investissement, la recherche en investissement et l’analyse financière ou toute autre forme de recommandation générale relative à des transactions sur instruments financiers. L’activité de la succursale concerne uniquement des CFD ayant pour sous-jacents des actions, titres de créances, indices, futures, options, parités de devises, matières premières agricoles ou minérales ou des produits énergétiques. Assurée par 17 salariés depuis 2015, cette activité est principalement axée sur la communication, le marketing et la publicité à destination de la clientèle francophone, l’émission d’informations de marché, d’analyses chartistes et d’« idées de trading », la réception physique de clients ou prospects, l’ouverture de comptes pour les clients francophones, la prise d’ordres téléphoniques de certains clients et l’assistance téléphonique en français. Les clients de la succursale doivent en principe transmettre leurs ordres au moyen de la plateforme Internet d’IG, à l’exception des clients dits « premium » qui peuvent les passer par téléphone en s’adressant à un commercial dédié. A l’été 2015, la succursale comptait 11 301 comptes ouverts, presque tous détenus par des clients non professionnels. PROCEDURE Le 22 juin 2015, le secrétaire général de l’AMF a décidé de procéder au contrôle du respect par IG de ses obligations professionnelles dans le cadre des activités de sa succursale en France. Le contrôle a donné lieu à l’établissement d’un rapport daté du 8 mars 2016, communiqué le 14 mars suivant à IG et auquel cette dernière a répondu par des observations adressées le 14 avril 2016. La Commission spécialisée n°1 du Collège de l’AMF a décidé, le 30 septembre 2016, de notifier des griefs à IG. Les griefs ont été notifiés à IG par lettre du 25 novembre 2016. -3- Il est reproché à IG, dans le cadre de l’activité de sa succursale en France d’avoir : - diffusé des recommandations d’investissement qui ne mentionnaient pas clairement l’identité de l’entité les ayant produites, présentaient de manière inexacte et trompeuse l’identité et la qualité de leurs auteurs et ne mentionnaient ni qu’IG agissait pour compte propre sur les CFD proposés ni les conflits d’intérêts dans lesquels elle se trouvait à cette occasion, en violation des articles L. 533-12 du code monétaire et financier, 314-10, alinéa 1, 315-2, 315-5 à 315-8 et 315-13 du règlement général de l’AMF ; - communiqué des informations inexactes et trompeuses en faisant état, d’une part, d’un investissement dans les sous-jacents des CFD ainsi que d’un accès direct des clients au marché et, d’autre part, d’un retour sur investissement important pour les CFD sur « sprint markets », en violation des articles L. 533-12 du code monétaire et financier, 314-10 et 314-18 du règlement général de l’AMF ; - omis de demander aux clients toutes les informations nécessaires pour vérifier leur niveau de connaissance et d’expérience en matière d’investissement, en particulier les types (achat/vente) et les volumes de transaction réalisés sur instrument financier, et, à défaut d’avoir veillé à la mise à jour des informations relatives aux clients, de s’être fondée sur des informations manifestement périmées, en violation du II de l’article L. 533-13 du code monétaire et financier et des articles 314-49, 314-51 et 314-53 du règlement général de l’AMF ; - manqué de diligence à l’égard de la mission l’article 143-3, alinéa 3, du règlement général de l’AMF. de contrôle de l’AMF, en violation de Une copie de la notification de griefs a été transmise le 25 novembre 2016 à la présidente de la Commission des sanctions conformément aux dispositions de l’article R. 621-38 du code monétaire et financier. Par décision du 7 décembre 2016, la présidente de la Commission des sanctions a désigné M. Bernard Field en qualité de rapporteur. Par lettre du 14 décembre 2016, IG a été informée qu’elle disposait d’un délai d’un mois, en application de l’article R. 621-39-2 du code monétaire et financier, pour demander la récusation du rapporteur dans les conditions prévues par les articles R. 621-39-3 et R. 621-39-4 du même code. Le 25 janvier 2017, IG a présenté des observations en réponse à la notification de griefs. Le 21 décembre 2017, IG a été entendue par le rapporteur. Le 15 janvier 2018, IG a transmis des documents complémentaires en réponse aux demandes formulées par le rapporteur lors de son audition. Le 19 avril 2018, le rapporteur a déposé son rapport. Par lettre du 19 avril 2018, à laquelle était joint le rapport du rapporteur, IG a été convoquée à la séance de la Commission des sanctions du 23 mai 2018 et informée qu’elle disposait d’un délai de quinze jours pour présenter des observations en réponse à ce rapport, conformément au III de l’article R. 621-39 du code monétaire et financier. Par lettre du 24 avril 2018, IG a été informée de la composition de la formation de la Commission des sanctions appelée à délibérer lors de la séance du 23 mai 2018 ainsi que du délai de quinze jours dont elle disposait, en application de l’article R. 621-39-2 du code monétaire et financier, pour demander, conformément aux articles R. 621-39-3 et R. 621-39-4 du même code, la récusation d’un ou plusieurs de ses membres. IG a déposé des observations en réponse au rapport du rapporteur le 4 mai 2018. -4- MOTIFS DE LA DECISION I. Sur les « lacunes des informations contenues dans les recommandations d’investissement » Il est reproché à IG d’avoir commis plusieurs manquements à ses obligations professionnelles à l’occasion de la diffusion de recommandations d’investissement écrites ou filmées, portant sur une stratégie d’achat ou de vente de CFD sur un sous-jacent déterminé, destinées au public ou aux canaux de distribution, et figurant en libre accès sur le site Internet de la société et sur ses comptes Twitter et Facebook ou sous forme de vidéos sur YouTube. Ces manquements seront examinés successivement. I.1. Sur la qualification de recommandation d’investissement Sur les textes applicables L’article 313-25 du règlement général de l’AMF, dans sa version en vigueur entre le 21 octobre 2011 et le 2 janvier 2018, disposait : « Lorsqu’elle est diffusée par un prestataire de services d’investissement, une recommandation d’investissement au sens du 1 de l’article R. 621-30-1 du code monétaire et financier, ci-après dénommée « recommandation d’investissement à caractère général », constitue : / 1° Soit une analyse financière ou une recherche en investissement lorsqu’elle est conforme à l’article L. 544-1 du code monétaire et financier, ci-après dénommée « analyse financière », soumise aux dispositions des articles 313-26 et 313-27 ; / 2° Soit, dans les autres cas, une communication à caractère promotionnel soumise aux dispositions de l’article 313-28 ». Le 1° de l’article 313-25 renvoie à l’article L. 544-1 du code monétaire et financier qui, dans sa version en vigueur entre le 24 octobre 2010 et le 2 janvier 2018, définissait la recherche en investissements ou l’analyse financière comme : « des travaux de recherche ou d'autres informations recommandant ou suggérant une stratégie d'investissement, explicitement ou implicitement, concernant un ou plusieurs instruments financiers ou les émetteurs d'instruments financiers, y compris les opinions émises sur le cours ou la valeur présente ou future de ces instruments, destinés aux canaux de distribution ou au public et pour lesquels les conditions suivantes sont remplies : / 1° Ces travaux ou informations sont désignés ou décrits par l'expression : "recherche en investissements" ou : " analyse financière ", ou sont autrement présentés comme une explication objective et indépendante du contenu de la recommandation ; / 2° Ils ne sont pas assimilables à la fourniture de conseils en investissement ; / 3° Ils sont effectués conformément aux dispositions du règlement général de l'Autorité des marchés financiers ». A compter du 3 janvier 2018, le contenu de l’article 323-15 a changé d’objet et l’article L. 544-1 du code monétaire et financier a été abrogé. Auparavant, le 3 juillet 2016, est entré en application le règlement (UE) n°596/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 sur les abus de marché (ci-après le « Règlement MAR ») dont l’article 3 alinéa 1 § 35 définit les recommandations d’investissement comme : « des informations recommandant ou suggérant une stratégie d’investissement, explicitement ou implicitement, concernant un ou plusieurs instruments financiers ou les émetteurs, y compris toute opinion émise sur le cours ou sur la valeur actuel(le) ou future de ces instruments, destinés aux canaux de distribution ou au public ». L’article 3 alinéa 1 § 34 du même règlement précise que les « informations recommandant ou suggérant une stratégie d’investissement » sont des informations : / « i) produites par un analyste indépendant, une entreprise d’investissement, un établissement de crédit, toute autre personne dont l’activité principale consiste à produire des recommandations d’investissement, ou une personne physique travaillant pour leur compte dans le cadre d’un contrat de travail ou autre, qui, directement ou indirectement, formule une proposition d’investissement déterminée concernant un instrument financier ou un émetteur ; ou / ii) produites par d’autres personnes que celles visées au point i), qui proposent directement une décision d’investissement déterminée concernant un instrument financier ». -5- Les dispositions de l’article 3 alinéa 1 § 35 du Règlement MAR, en ce qu’elles n’exigent pas que les conditions des alinéas 1°, 2° et 3° de l’article L. 544-1 du code monétaire et financier soient remplies, sont plus douces que les dispositions précitées des articles 313-25 du règlement général de l’AMF et L. 544-1 du code monétaire et financier, de sorte qu’elles doivent être appliquées de manière rétroactive. Sur la qualification : Il résulte des dispositions de l’article 3, alinéa 1, § 34 et § 35 du Règlement MAR que, pour qualifier une information de recommandation d’investissement, les conditions suivantes doivent être réunies : (i) l’information doit recommander ou suggérer une stratégie d’investissement, explicitement ou implicitement, ce qui signifie qu’elle doit : a. b. (ii) être produite par un analyste indépendant, une entreprise d’investissement, un établissement de crédit ou toute autre personne dont l’activité principale consiste à produire des recommandations d’investissement, et, formuler directement ou indirectement une proposition d’investissement déterminée concernant un instrument financier ou un émetteur ; l’information doit concerner un ou plusieurs instruments financiers ou les émetteurs, y compris toute opinion émise sur le cours ou la valeur actuelle ou future de ces instruments, destinés aux canaux de distribution ou au public. En l’espèce, IG a conclu avec une entreprise spécialisée en analyse technique financière un « contrat de fourniture d’analyses techniques », qui stipule que l’entreprise fournit à IG des analyses techniques ou des commentaires de marchés sur des thèmes liés aux actions, indices, devises et matières premières, sous le format d’« idées de trading », de « point de marché », de « point action » et « point bourse ». Ces analyses et commentaires, reçus par IG sous format « word », étaient ensuite diffusés sur une page Internet de son site, dans la rubrique « news et analyses », sur YouTube sous la forme de vidéos d’une quarantaine de secondes ou via des liens hypertextes sur Twitter. Il convient de préciser que, quel que soit le format choisi, l’information diffusée était la même, les salariés de la succursale d’IG étant filmés en lisant le texte et en commentant les graphiques projetés en arrière-plan. Les analyses figurant au dossier, diffusées sur le site internet d’IG, et/ou sous forme de vidéos sur YouTube et/ou sous forme de liens hypertextes sur Twitter entre le 6 mai 2015 et le 2 décembre 2015, comportent chacune un graphique précisant les niveaux de prix remarquables, un texte indiquant les tendances actuelles et l’analyse du cours, l’objectif de prix attendu et les niveaux chartistes. Ainsi, par exemple, une « idée de trading » du 2 décembre 2015, diffusée sur le site Internet d’IG et sur YouTube, concernait le marché des devises EUR/JPY au comptant. Elle indiquait que « le dépassement ce matin de la résistance horizontale située à 130,80 ¥ milite pour un rebond en direction de 132,20 ¥. Nous initions une stratégie d’achat dans cette configuration ». Elle présentait ensuite un graphique qui précisait l’objectif à 132,20 ¥, le stop à 130,30 ¥. Le 2 décembre 2015, IG a également diffusé, sur son site Internet et sur YouTube, un « point action » concernant l’émetteur Vivendi. Outre le graphique indiquant les niveaux chartistes, ce point précisait que « l'ouverture d'un gap baissier suite à la publication de ses derniers résultats trimestriels témoigne de la pression exercée par le courant vendeur, et le comportement des cours depuis lors présage d'une nouvelle vague de baisse en direction des 18,70€.» Figurent également au dossier des pages Internet et des vidéos intitulées « point indice » ou « point matière première ». Ces « idées de trading » ainsi que les divers points, qui ont été produits par l’entreprise spécialisée, cocontractante d’IG, dont l’activité principale consiste à produire ce type d’information, formulent des propositions d’investissement déterminées, explicites – lorsqu’il est fait état d’une « stratégie d’achat » - ou implicites - lorsque -6- l’analyse énonce un objectif de prix - concernant des instruments financiers. Elles font état d’une opinion sur le cours de ces instruments financiers, sur leur valeur actuelle ou future et sont diffusées auprès du public, de sorte qu’elles répondent à la définition de recommandation d’investissement au sens de l’article 3 alinéa 1 § 34 et § 35 du Règlement MAR. I.2 Sur l’absence de mention claire par IG de l’identité du producteur des recommandations d’investissement qu’elle diffusait La notification de griefs reproche à IG de s’être abstenue de mentionner clairement que les recommandations qu’elle diffusait étaient réalisées par un prestataire externe spécialisé dans la fourniture d’analyses et d’études techniques financières, en violation de l’article 315-2 du règlement général de l’AMF. IG fait valoir que si certaines recommandations d’investissement qu’elle diffusait ne comportaient pas la signature du prestataire externe, celles-ci représentaient une faible proportion au regard du nombre total de recommandations diffusées sur son site Internet. Elle ajoute avoir remédié à cette carence dès la fin du contrôle de l’AMF et renforcé ses procédures de contrôle interne en la matière, notamment par la mise en place d’un contrôle systématique de l’existence des mentions requises par la fonction de conformité. IG en conclut qu’eu égard à ces éléments, qui atténuent significativement la portée du manquement reproché, celui-ci devrait être écarté. Sur les textes applicables Les faits reprochés, qui se sont déroulés entre mai et décembre 2015, seront examinés au regard des textes alors applicables, sous réserve de l’application rétroactive de dispositions plus douces entrées en vigueur postérieurement. er L’article 315-2 du règlement général de l’AMF, dans sa version en vigueur entre le 1 novembre 2007 et le 23 septembre 2016, disposait : « Toute recommandation d’investissement diffusée mentionne clairement et de façon bien apparente : / 1° L’identité du prestataire de services d’investissement responsable de sa production, […] ». A ces dispositions, supprimées par un arrêté du 14 septembre 2016, se sont substituées celles, entrées en application le 3 juillet 2016, des articles 2 et 8 du règlement délégué n° 2016/958 du 9 mars 2016 complétant le règlement (UE) n°596/2014 du Parlement européen et du Conseil par des normes techniques de réglementation définissant les modalités techniques de présentation objective de recommandations d’investissement ou d’autres informations recommandant ou suggérant une stratégie d’investissement et la communication d’intérêts particuliers ou de l’existence de conflits d’intérêts (ci-après le « règlement délégué MAR »). L’article 2 du règlement délégué MAR dispose : « 1. Les personnes qui produisent des recommandations d’investissement ou d’autres informations recommandant ou suggérant une stratégie d’investissement […] divulguent clairement et de façon bien apparente […] leur identité […] ». Aux termes de l’article 8 du même règlement : « 1. Les personnes qui diffusent des recommandations produites par un tiers communiquent aux destinataires des recommandations les informations suivantes : a) leur identité, clairement et de façon bien apparente ; […] ». L’obligation de communiquer « leur identité » instituée à l’article 8 1°) a) du règlement délégué MAR porte à la fois sur l’identité du diffuseur de la recommandation d’investissement et celle du producteur de celle-ci. Au demeurant, cette analyse est confortée par le 2. de l’article 9 du règlement délégué MAR qui fait très clairement peser sur le diffuseur d’un résumé ou d’un extrait d’une recommandation - dont rien ne justifie la soumission à un régime différent sur ce point - l’obligation de communiquer ou de rendre accessible l’identité du producteur. -7- Les dispositions précitées de l’article 8 1°) a) du règlement délégué MAR sont donc équivalentes à celles de l’article 315-2 du règlement général de l’AMF s’agissant de l’information relative à l’identité du producteur d’une recommandation, de sorte que c’est à la lumière de ce dernier texte, dans sa version en vigueur à l’époque des faits, que le manquement sera examiné. Sur l’examen du grief IG a conclu avec une entreprise spécialisée en analyse technique financière un « contrat de fourniture d’analyses techniques », en exécution duquel cette entreprise a fourni à IG des recommandations d’investissement que cette dernière a diffusé sur YouTube ou sur son site internet et sur Twitter sous l’intitulé « idée de trading », sans modification de leur contenu. Sur la vingtaine de recommandations d’investissement figurant au dossier, diffusées par IG sur son site Internet, sur Twitter ou sur YouTube, seules deux vidéos comportent la mention de l’identité de l’entreprise spécialisée les ayant produites. Il est donc établi qu’IG a manqué à l’obligation de mentionner l’identité du producteur de la recommandation d’investissement prévue à l’article 315-2 du règlement général de l’AMF. I.3. Sur l’existence d’informations peu claires, inexactes ou trompeuses relatives à l’identité et aux qualifications de l’auteur des recommandations d’investissement diffusées par IG La notification de griefs reproche à IG d’avoir présenté une information inexacte et trompeuse sur l’identité et la qualité des auteurs des recommandations d’investissement, présentées comme produites par des « analystes » d’IG alors qu’il s’agissait de vendeurs n’exerçant aucune fonction d’analyste financier, en violation de l’article L. 533-12 du code monétaire et financier, complété par l’article 314-10, alinéa 1, du règlement général de l’AMF. Si IG reconnaît avoir fait figurer « malencontreusement » sur son site Internet la mention d’« analystes » pour cinq collaborateurs de sa succursale française, elle précise qu’il s’agissait d’une qualification utilisée en interne qui ne correspondait aucunement à celle d’analyste financier. Elle souligne n’avoir eu aucune intention d’induire quiconque en erreur et précise avoir procédé sans délai au changement de ces mentions dès qu’elle a eu connaissance des remarques des contrôleurs de l’AMF, en remplaçant le terme « analyste » par ceux correspondant au statut de chaque collaborateur d’IG. Au vu de ces éléments, IG considère que le grief ne devrait pas être maintenu. Sur les textes applicables Les faits reprochés, qui se sont déroulés entre mai et décembre 2015, seront examinés au regard des textes alors applicables, sous réserve de l’application rétroactive de dispositions plus douces entrées en vigueur postérieurement. er Le I de l’article L. 533-12 du code monétaire et financier, dans sa version en vigueur entre le 1 novembre 2007 et le 2 janvier 2018, disposait : « I – Toutes les informations, y compris les informations à caractère promotionnel, adressées par un prestataire de services d’investissement à des clients, notamment des clients potentiels, présentent un contenu exact, clair et non trompeur. Les communications à caractère promotionnel sont clairement identifiables en tant que telles ». Postérieurement à la date des faits, l’ordonnance du 22 juin 2017 a exclu du champ d’application de cet article les sociétés de gestion de portefeuille. Toutefois, une telle modification est sans incidence dès lors que la même ordonnance a créé un nouvel article L. 533-22-1 comportant des dispositions équivalentes à celles de l’article L. 533-12, applicable aux sociétés de gestion de portefeuille. L’article 314-10 du règlement général de l’AMF, dans sa version en vigueur du 21 octobre 2011 au 2 janvier 2018, disposait : « Le prestataire de services d’investissement veille à ce que toute l’information, y -8- compris à caractère promotionnel, qu’il adresse à des clients, remplisse les conditions posées au I de l’article L. 533-12 du code monétaire et financier. / […] ». Postérieurement aux faits, le 3 janvier 2018, les dispositions de l’article 314-10 du règlement général de l’AMF précité ont été supprimées. Les faits notifiés à IG seront donc examinés à la lumière de l’article L. 533-12 du code monétaire et financier, dans sa version en vigueur à l’époque des faits. Sur l’examen du grief Sur les vingt recommandations d’investissement diffusées par IG sur son site Internet sous l’appellation « idée de trading » qui figurent au dossier, dix-huit comportaient, en haut de page, la photo d’un des cinq salariés officiant au sein de la succursale d’IG sous laquelle était indiqué son nom ainsi que la mention « analyste IG, Paris ». Or, aucun salarié de la succursale n’exerçait la fonction d’analyste financier ni ne disposait des qualifications requises pour exercer cette profession, ces salariés exerçant les fonctions de « conseillers commerciaux » pour quatre d’entre eux et de « chargé de compte premium » pour le cinquième. Dès lors, la mention d’« analyste IG » qui accompagnait la publication des « idées de trading » sur le site Internet d’IG était manifestement inexacte. Elle était en outre trompeuse sur la qualité des salariés d’IG et était à ce titre de nature à induire en erreur les clients de la société en donnant une légitimité supplémentaire aux analyses diffusées et à IG. La circonstance que des mesures aient par la suite été mises en place en vue de remédier aux dysfonctionnements constatés n’a pas d’incidence sur la caractérisation du manquement. La violation de l’obligation, prévue à l’article L. 533-12 du code monétaire et financier, de communiquer à ses clients une information au contenu exact, clair et non trompeur est donc caractérisée. I.4. Sur l’absence de mention de conflits d’intérêts et des procédures destinées à les gérer La notification de griefs reproche à IG d’avoir omis d’informer ses clients, d’une part, qu’elle agissait pour compte propre sur les CFD qu’elle leur proposait, en qualité de teneur de marché, d’autre part, de l’existence de conflits d’intérêts générés par cette activité et, enfin, des procédures de gestion de conflits d’intérêts de type « barrières à l’information » mises en place, en violation des articles 315-5 à 315-8 et 315-13 du règlement général de l’AMF. IG reconnaît qu’elle est soumise aux prescriptions de l’article 315-13 du règlement général de l’AMF, qui impose à toute personne diffusant des recommandations d’investissement produites par un tiers de respecter les obligations applicables aux producteurs de celles-ci prévues aux articles 315-6, alinéa 4, et 315-7 à 315-11 du règlement général de l’AMF. Elle relève toutefois que l’application de l’article 315-6, alinéa 4, du règlement général de l’AMF suppose que le producteur de la recommandation travaille « sous l’autorité ou pour le compte » du diffuseur, ce qui n’est, selon elle, pas le cas en l’espèce, le producteur des recommandations étant indépendant et mettant à disposition de ses nombreux clients des analyses sur ses deux sites Internet, sans qu’IG ne puisse intervenir sur le contenu des recommandations qu’elle diffuse. Elle relève également, s’agissant des articles 315-7 à 315-11 du règlement général de l’AMF, que leur application au diffuseur suppose que le producteur de la recommandation ne l’ait pas déjà diffusée par un canal donnant accès à l’information à un grand nombre de personnes. Or, elle estime que cette condition n’est pas remplie en l’espèce dès lors que le producteur de recommandations avec lequel IG a conclu un contrat de fourniture d’analyses financières proposait des recommandations d’investissement à de nombreux acteurs de la place. A ce titre, IG fournit des exemples d’articles rédigés par le prestataire et publiés sur des sites d’informations financières. Son point de vue serait d’ailleurs conforté par la position-recommandation AMF n°2013-25 « Guide relatif à l’analyse financière », qui précise que « les obligations en matière de présentation des recommandations et mention des conflits d’intérêts sont différentes pour le diffuseur selon les situations décrites dans l’article -9- 327-23 », et que « si un PSI diffuse une analyse produite par un tiers (et ne la modifie pas de façon substantielle), et que le producteur l’a déjà diffusée, […] le PSI n’est pas tenu aux dispositions sur les normes de présentation (puisque la recommandation est élaborée par un tiers qui doit les respecter). Dans ce cas il n’est pas utile que le PSI mentionne ses conflits d’intérêts car il n’a pas pu influencer le sens de la recommandation puisqu’elle a déjà été publiée ». Sur les textes applicables Les faits reprochés, qui se sont déroulés entre juin 2015 et mars 2016, seront examinés au regard des textes alors applicables, sous réserve de l’application rétroactive de dispositions plus douces entrées en vigueur postérieurement. er L’article 315-13 du règlement général de l’AMF, dans sa version en vigueur entre le 1 novembre 2007 et le 17 décembre 2016, disposait : « Quand un prestataire de services d’investissement diffuse des analyses ou recommandations d’investissement produites par un tiers, il est tenu aux obligations suivantes : / 1° Il indique clairement et d’une façon bien apparente sa propre identité et le nom de l’autorité compétente dont il relève ; / 2° Il respecte les obligations imposées au producteur au quatrième alinéa de l’article 315-6 et aux articles 315-7 à 315-11 si le producteur de cette analyse ne l’a pas déjà diffusée par un canal donnant accès à l’information à un grand nombre de personnes ». er L’article 315-5 du règlement général de l’AMF, dans sa version en vigueur entre le 1 novembre 2007 et le 17 décembre 2016, énonçait : « La recommandation d'investissement diffusée présente les relations et circonstances concernant l'analyste ou le prestataire de services d'investissement, dont on peut raisonnablement penser qu'elles sont de nature à porter atteinte à l'objectivité de la recommandation, en particulier lorsque le prestataire ou l'analyste ou toute personne qui a participé à l'élaboration de la recommandation a un intérêt financier significatif portant sur un ou plusieurs instruments financiers faisant l'objet de la recommandation ou un conflit d'intérêts significatif avec un émetteur auquel se rapporte la recommandation ». er L’article 315-6 du règlement général de l’AMF, dans sa version en vigueur entre le 1 novembre 2007 et le 17 décembre 2016, prévoyait : « Les informations à fournir conformément à l'article 315-5 incluent au moins, s'agissant du prestataire de services d'investissement ou des personnes morales qui lui sont liées / : 1° Leurs intérêts ou conflits d'intérêts éventuels, dont la connaissance est accessible ou peut raisonnablement être considérée comme accessible aux personnes participant à l'élaboration de la recommandation ; / 2° Leurs intérêts ou conflits d'intérêts éventuels, qui sont connus de personnes n'ayant pas participé à l'élaboration de la recommandation mais ayant accès ou pouvant raisonnablement être considérées comme ayant accès à la recommandation avant sa diffusion aux clients ou au public. / Lorsque des personnes physiques ou morales qui travaillent sous l'autorité ou pour le compte du prestataire participent à l'élaboration de la recommandation, les informations à fournir incluent en particulier la mention que leur rémunération est liée, le cas échéant, aux services d'investissement mentionnés aux 3 [négociation pour compte propre], 6-1 et 6-2 de l'article L. 321-1 du code monétaire et financier ou aux services connexes mentionnés aux 3 et 5 de l'article L. 321-2 dudit code fournis par le prestataire de services d'investissement ou toute personne morale qui lui est liée ». er L’article 315-7 du règlement général de l’AMF, dans sa version en vigueur entre le 1 novembre 2007 et le 17 décembre 2016, disposait : « La recommandation diffusée mentionne clairement et d’une façon bien visible les informations suivantes sur les intérêts et conflits d’intérêts du prestataire de services d’investissement : / […] 3° Le prestataire de services d’investissement ou toute personne morale qui lui est liée est un teneur de marché ou un apporteur de liquidité, avec lequel a été conclu un contrat de liquidité en ce qui concerne les instruments financiers de l’émetteur ». Enfin, l’article 315-8 du règlement général de l’AMF, en vigueur entre le 28 août 2008 et le 17 décembre 2016, disposait : « La recommandation d’investissement diffusée mentionne, en termes généraux, les modalités administratives et organisationnelles effectives arrêtées au sein du prestataire de services d’investissement, y compris les « barrières à l’information », afin de prévenir et d’éviter les conflits d’intérêts eu égard aux recommandations d’investissement ». - 10 - Les dispositions précitées des articles 315-13 et 315-5 à 315-8 ont été supprimées par un arrêté du 14 décembre 2016. Elles ont néanmoins été remplacées par des dispositions équivalentes figurant aux articles 5, 6 et 8 du règlement délégué MAR, entré en vigueur le 3 juillet 2016. En conséquence, il y a lieu d’examiner les faits à la lumière des articles 315-13 et 315-5 à 315-8 du règlement général de l’AMF, dans leur version en vigueur à l’époque des faits. Sur l’examen du grief - Sur l’application à IG de l’article 315-13 du règlement général de l’AMF. Il résulte de l’article 315-13 du règlement général de l’AMF qu’un prestataire de services d’investissement qui diffuse une recommandation d’investissement produite par un tiers doit respecter les obligations prévues au quatrième alinéa de l’article 315-6 et aux articles 315-7 à 315-11 du règlement général de l’AMF et, en particulier, mentionner clairement et de façon bien visible certaines informations sur ses intérêts et conflits d’intérêts, à moins que cette recommandation ait déjà été diffusée par son producteur par un canal donnant accès à l’information à un grand nombre de personnes. Le contrat de fourniture d’analyses techniques conclu entre le prestataire externe et IG prévoit les modalités de diffusion des analyses, selon leur format. Il stipule que les « idées de trading » sont « disponibles uniquement dans les espaces réservés aux clients d’IG (accès par code et mot de passe) et notamment dans le site « Insight » [qui] regroupe les analyses et les commentaires disponibles pour les clients » et que les analyses diffusées sous le format « point de marche », « analyse action » « point bourse » ou « bilan mensuel » sont « disponibles sur tous les sites retenus par IG ». Il en résulte que les recommandations d’investissement étaient seulement diffusées par IG sur son site Internet ou sur ses sites partenaires. Il apparaît d’ailleurs peu vraisemblable qu’IG ait acheté auprès du prestataire des recommandations déjà mises à disposition d’autres clients. En outre, s’il est vrai que, comme l’indique IG, certains articles rédigés par le prestataire étaient publiés sur des sites Internet d’information financière, ces articles concernaient des sujets généraux et aucun élément du dossier ni aucun exemple fourni par IG ne permet d’établir que la diffusion sur ces autres sites concernait les recommandations d’investissement publiées par IG et surtout, que cette diffusion sur les autres sites intervenait préalablement à la diffusion des recommandations sur le site d’IG. Dans ces conditions, les obligations prévues par l’article 315-13 du règlement général de l’AMF étaient donc bien applicables à IG. - Sur l’application des articles 315-5 et 315-6 du règlement général de l’AMF. L’article 315-13 du règlement général de l’AMF, qui rend applicables au diffuseur d’analyses ou recommandations d’investissement produites par un tiers les obligations prévues à l’égard du producteur de celles-ci par les articles 315-6, alinéa 4, et 315-7 à 315-11 du règlement général de l’AMF, ne renvoie pas aux articles 315-5 et 315-6, alinéas 1 à 3, du même règlement. Il en résulte que les articles 315-5 et 315-6, alinéas 1 à 3, du règlement général de l’AMF ne sont pas applicables aux personnes qui, comme IG en l’espèce, diffusent des recommandations produites par des tiers. Par ailleurs, bien qu’invoquant la violation de l’article 315-6 du règlement général de l’AMF, sans distinguer entre les alinéas de ce texte, la notification de griefs n’en cite que les trois premiers et ne mentionne aucun élément de fait se rapportant à des « personnes physiques ou morales qui travaillent sous l’autorité ou pour le compte du prestataire de services d’investissement » au sens du quatrième alinéa. Dès lors, aucun manquement aux articles 315-5 et 315-6 du règlement général de l’AMF ne peut être retenu à l’encontre d’IG. - 11 - - Sur l’examen du manquement d’IG aux articles 315-7 et 315-8 du règlement général de l’AMF, auxquels renvoie l’article 315-13 du même règlement. Aucune stipulation du contrat conclu entre IG et l’entreprise spécialisée qui lui livrait les analyses techniques et commentaires de marché n’autorisait la première à demander la fourniture d’une analyse sur une valeur précise. Par ailleurs, dans ses observations en réponse au rapport du rapporteur, qui ne sont contredites ni par le contrat précité ni par un autre élément du dossier, IG a indiqué qu’elle n’avait « jamais choisi les recommandations d'investissement à diffuser qui étaient fournies par [l’entreprise] », ce dont il s’infère qu’elle diffusait toutes les recommandations d’investissement fournies sans opérer aucune sélection. Enfin, l’article 4 du contrat stipule qu’en cas de diffusion par IG des analyses fournies sur l’« espace client » de son site Internet, cette dernière est autorisée « à copier, représenter, adapter, traduire, arranger ou modifier (sans en changer le sens), résumer et diffuser » ces analyses sur différents supports marketing. Le rapport de contrôle relève de manière plus générale que « les analyses transmises par [l’entreprise spécialisée] sont reprises à l’identique lors de leur diffusion par la succursale d’IG Markets », constat qui corrobore l’affirmation figurant dans les observations d’IG en réponse à la notification de griefs selon laquelle « [l’entreprise spécialisée] élabore en toute indépendance ses recommandations, dont IG Markets ne peut en aucun cas modifier le sens, et […] qui sont relayées dans leur intégralité aux clients de IG Markets ». Il s’en déduit qu’IG diffusait les recommandations produites par l’entreprise sans les modifier. Il résulte de ces éléments qu’IG, qui se bornait à diffuser toutes les recommandations d’investissement fournies par un tiers sans intervenir dans le choix de celles-ci ni leur apporter de modification, n’exerçait aucune influence sur le contenu ou le sens des recommandations qu’elle diffusait et, partant, n’avait pas à faire connaître à ses clients les conflits d’intérêts liés à cette activité. Au demeurant, la position-recommandation AMF n° 2013-25 prévoit elle-même un cas de figure dans lequel un prestataire de services d’investissement n’a pas à mentionner ses conflits d’intérêts au motif que, comme en l’espèce, celui-ci « n’a pas pu influencer le sens de la recommandation ». Dès lors, aucun manquement à l’article 315-7 et à l’article 315-8 du règlement général de l’AMF ne peut être retenu à l’encontre d’IG. II. Sur les « informations ne présentant pas un contenu clair, exact et non trompeur dans les communications à caractère promotionnel » La notification de griefs soutient que les communications à caractère promotionnel d’IG, librement accessibles sur son site Internet, font état, d’une part, d’un investissement des clients dans les sous-jacents ainsi que d’un « accès direct au marché » de ceux-ci ou encore de la passation des ordres des clients « directement dans le carnet d’ordres des places boursières », alors que ces derniers réalisent des transactions de gré à gré sur des CFD dont IG est l’unique contrepartie, d’autre part, d’« un retour sur investissement important » des CFD sur « sprint markets », alors qu’entre janvier 2014 et juin 2015, 84 % des clients de la succursale ont subi des pertes cumulées de 1,2 million d’euros, tandis que les 16 % restants bénéficiaient de gains de 0,1 million d’euros. Elle en déduit que les informations fournies étaient inexactes et trompeuses, en violation de l’article L. 533-12 du code monétaire et financier et des articles 314-10 et 314-18 du règlement général de l’AMF. Enfin, en vue de souligner la gravité du manquement, elle relève que 99,96 % des clients de la succursale sont des non professionnels et que 86,6 % d’entre eux ont subi des pertes d’un montant moyen de 5 015 livres sterling entre janvier 2014 et juin 2015. S’agissant de l’information fournie sur les transactions relatives aux CFD et leurs modalités, IG conteste son caractère inexact et trompeur en faisant valoir que la poursuite met en exergue une phrase « isolée et malencontreuse » qui ne reflète pas la qualité des informations communiquées à ses clients. Elle se prévaut à cet égard des indications figurant dans un document intitulé « Déclaration des risques » (« Les CFD sont des - 12 - opérations hors cote », « Nos CFD ne sont pas effectués sur les places boursières. Nous définissons nous-mêmes leurs cours et leurs modalités […]. Chaque CFD ouvert en votre nom par notre bureau de trading (y compris sur la plateforme DMA) représente un contrat conclu avec nous […] », « Nos CFD ne vous confèrent aucun droit de propriété sur les sous-jacents […] ») ou encore dans son « guide d'utilisation DMA Trading » (« Il est important que vous reteniez que, même si vous opérez sur la base des cours du sous-jacent et dans la profondeur du marché, en réalité lorsque vous ouvrez une position vous détenez un CFD. […] Si vous disposez des fonds nécessaires, nous transmettons simultanément l’ordre sur le marché en notre nom et nous exécutons, en parallèle un CFD entre vous et nous / De ce fait, même si vous intervenez au cours des marchés, vous ne possédez pas la propriété des actions qui composent le sous-jacent du CFD »). Elle ajoute que le terme « DMA », acronyme de direct market access ou, en français, accès direct au marché, est communément utilisé et traduit la réalité économique du service fourni aux clients consistant à leur donner accès aux livres d’ordres et, ainsi, à leur permettre de fixer leurs prix d’achat et de vente indépendamment d’IG qui conclut alors un CFD avec ses clients dans les conditions de prix qu’ils auraient obtenues sur le marché. Elle précise avoir néanmoins remplacé le terme d’« accès direct au marché » par celui d’« accès direct aux prix du marché ». Concernant le retour sur investissement des CFD sur sprint markets, IG considère que le manquement ne doit pas être maintenu. Elle fait valoir que la rentabilité des CFD sur sprint markets peut effectivement atteindre 70 à 90 %, que les avertissements sur les risques de pertes sont clairement mentionnés sur la page Internet qui fait état des possibilités de gains et que les explications fournies sur de nombreuses autres pages du site permettent à l’investisseur de comprendre la portée et les conséquences de son investissement. IG indique avoir néanmoins modifié la mention critiquée après le contrôle de l’AMF en mettant en exergue le caractère seulement potentiel du retour sur investissement (« Retour sur investissement potentiellement important », « Profits sur trades gagnants pouvant aller de 70 % à 90 % ») et en agrandissant la police de caractère de l’avertissement « Produit présentant un fort risque de perte en capital ». Elle ajoute que les CFD sur sprint markets ne sont plus proposés aux clients francophones d’IG depuis 2016, ce qui a conduit au retrait de la communication commerciale s’y rapportant. Sur les textes applicables Les faits reprochés, relevés par les contrôleurs en septembre 2015, seront examinés au regard des textes alors applicables, sous réserve de l’application rétroactive de dispositions plus douces entrées en vigueur postérieurement. Il a été dit que le I de l’article L. 533-12 du code monétaire et financier, dans sa version en vigueur entre le er 1 novembre 2007 et le 3 janvier 2018, applicable à l’époque des faits et qui disposait que « toutes les informations, y compris les informations à caractère promotionnel, adressées par un prestataire de services d’investissement à des clients, notamment des clients potentiels, présentent un contenu exact, clair et non trompeur. […] » n’avait pas ensuite été modifié dans un sens plus doux et que l’article 314-10, alinéa 1, du règlement général de l’AMF qui se bornait, dans sa version alors applicable, à renvoyer à ces dernières dispositions, avait depuis été supprimé. L’article 314-18 du règlement général de l’AMF, dans sa version en vigueur entre le 24 octobre 2011 et le 2 janvier 2018, énonçait : « Des informations appropriées sont communiquées aux clients sous une forme compréhensible sur : / 1° Le prestataire de services d’investissement et ses services ; / 2° Les instruments financiers et les stratégies d’investissement proposées, ce qui devrait inclure des orientations et des mises en garde appropriées sur les risques inhérents à l’investissement dans ces instruments ou à certaines stratégies d’investissement ; / 3° S’il y a lieu, les systèmes d’exécution ; 4° Les coûts et frais liés. / La communication de ces informations a pour objectif de permettre raisonnablement aux clients de comprendre la nature du service d’investissement et du type spécifique d’instrument financier proposé ainsi que les risques y afférents et, par - 13 - conséquent, de prendre des décisions en matière d’investissement en connaissance de cause. Ces informations peuvent être fournies sous une forme normalisée ». A compter du 3 janvier 2018, le contenu de l’article 314-18 a changé d’objet. Toutefois, les II et III de l’article L. 533-12 du code monétaire et financier, dans leur version en vigueur depuis cette dernière date, disposent : « II.- Les prestataires de services d'investissement […] communiquent en temps utile à leurs clients, notamment leurs clients potentiels, des informations appropriées en ce qui concerne le prestataire de services d'investissement […] et ses services, les instruments financiers et les stratégies d'investissement proposés, les lieux d'exécution et tous les coûts et frais liés./ […] / III.- Les informations mentionnées au II sont fournies sous une forme compréhensible de manière à ce que les clients, notamment les clients potentiels, puissent raisonnablement comprendre la nature du service d'investissement et du type spécifique d'instrument financier proposé ainsi que les risques y afférents, afin que les clients soient en mesure de prendre leurs décisions d'investissement en connaissance de cause./ Ces informations peuvent être fournies sous une forme normalisée dans des conditions fixées par le règlement général de l'Autorité des marchés financiers. ». Ainsi, les obligations anciennement énoncées à l’article 314-18 du règlement général de l’AMF figurent désormais dans des termes équivalents aux II et III de l’article L. 533-12 du code monétaire et financier, qui ajoutent que les informations doivent être fournies en temps utile et l’être également aux clients potentiels et, partant, ne sont pas plus douces. Il s’ensuit que les faits seront examinés à la lumière du I de l’article L. 533-12 du code monétaire et financier et de l’article 314-18 du règlement général de l’AMF, dans leur version applicable à l’époque des faits. Sur l’examen du grief L’information fournie sur les transactions relatives aux CFD et leurs modalités Les CFD sont des contrats financiers négociés de gré à gré (en l’espèce entre les clients et IG) entrant dans la catégorie des instruments financiers à terme dotés d’un effet de levier, ayant pour objet le règlement de la différence entre le prix du sous-jacent à la date de conclusion du contrat et son prix à la date d’exercice. Il ne s’agit donc pas d’un investissement dans le sous-jacent, sur lequel les CFD ne confèrent aucun droit. Par ailleurs, il n’est pas contesté que l'offre « Direct Market Access – DMA » d’IG ne permettait pas aux clients de passer eux-mêmes des ordres directement sur le marché du sous-jacent. Pour apprécier la qualité de l’information fournie sur un site Internet, il convient d’analyser chaque page indépendante ou contenu accessible au moyen d’un téléchargement de manière séparée. Les copies d’écran versées au dossier établissent que les mentions suivantes figuraient sur le site d’IG : « accéder à plus de 10 000 valeurs » (onglet ouvrir un compte), « Plateforme DMA (L2) Bénéficiez d’un Accès Direct aux Marchés (DMA) et passez vos ordres sur actions directement dans les carnets d’ordres des marchés » (onglet Plateformes avancées), « La négociation en DMA (Accès Direct aux Marchés) vous permet d'i[nt]ervenir directement dans le carnet d'ordres des valeurs » (onglet accès direct marché). Ces mentions, visibles sur trois pages distinctes du site Internet, laissent entendre, à tort, que les clients investissent dans les sous-jacents ou encore qu’ils accèdent directement aux marchés de ces sous-jacents ou à leurs carnets d’ordres. Une autre page du site (onglet Actions > Actions en DMA) fait également état, de manière erronée, d’un accès direct des clients au marché du sous-jacent (« Actions en DMA / Passez vos ordres directement dans le carnet d’ordres des places boursières », « Tradez les actions en DMA et accédez à la liquidité de carnets d’ordres multiples issus de courtiers, Dark Pools de MTF, teneurs de marchés dédiés, places boursières et carnet d’ordres de MTF ») mais comporte par ailleurs des mentions dont il se déduit que la prise de position sur le marché du sous-jacent est réalisée par IG (« Le DMA rajoute certaines subtilités à l’environnement de trading […]. Etant donné que nous ouvrons une position sur le marché sous-jacent afin de vous offrir un contrat en parallèle, il est important de retenir qu’une fois l’ordre exécuté il n’est plus possible de le modifier ou de l’annuler »). - 14 - Il en résulte que les indications fournies sur cette page, contradictoires, souffrent d’un manque de clarté. Pour apprécier la qualité de l’information fournie sur chacune des pages du site qui viennent d’être évoquées, il n’y a pas lieu de tenir compte des éléments mentionnés sur d’autres pages qui, eux, sont clairs quant à l’absence d’investissement sur le marché sous-jacent et les modalités de réalisation des transactions relatives aux CFD (onglet Autres marchés > Obligations > Conditions CFD sur Obligations : « Nos CFD sont des contrats de gré à gré […] » ; onglet Services IG > CFD : « Lorsque vous passez des ordres avec les CFD, vous négociez sur un marché dérivé : vous n’êtes donc jamais propriétaire des valeurs négociées »). Pareillement, il est indifférent que les documents téléchargeables à partir de ce site intitulés « Déclaration des risques » et « guide d’utilisation DMA trading » comportent des indications exactes sur les points examinés. Au demeurant, si les mentions du guide d’utilisation invoquées par IG, toutes situées dans la partie intitulée « La nature de notre contrat DMA », indiquent que le client n’investit pas dans le sous-jacent et n’a pas d’accès direct au marché, d’autres mentions du même document font état d’un accès direct du client au marché sous-jacent (« L’accès direct aux marchés signifie que vous intervenez dans le marché réglementé où le sous-jacent se négocie. La contrepartie de votre transaction n’est plus IG Markets mais les autres intervenants du marché sur lequel vous opérez »), de sorte que l’information fournie par ce guide est contradictoire et, partant, non claire. Il résulte de ce qui précède que l’information fournie sur plusieurs pages du site Internet était inexacte ou manquait de clarté. Compte tenu du caractère objectif du manquement, la volonté d’IG de communiquer à ses clients une information de qualité, à la supposer établie, est sans incidence sur la caractérisation de celui-ci. Il s’ensuit que le manquement à l’obligation d’IG de communiquer à ses clients une information présentant un contenu exact, clair et non trompeur, conformément aux articles L. 533-12 du code monétaire et financier et 314-10, alinéa 1, du règlement général de l’AMF, est établi. Compte tenu des informations en cause, qui ont trait à l’objet de l’investissement et aux modalités de sa réalisation, le manquement à l’obligation de délivrer une information appropriée aux clients sur le service proposé, prévue à l’article 314-18 du règlement général de l’AMF, est également caractérisé. L’information fournie sur le retour sur investissement des sprint markets Les CFD sur sprint markets constituent un type d’options binaires à court terme dont la durée de vie est comprise entre 60 secondes et 60 minutes, sans possibilité de clôture de la position avant l’échéance, et qui repose sur une anticipation de l’évolution du cours d’un sous-jacent, à la hausse ou à la baisse, à une échéance très courte fixée par avance. La copie d’écran versée au dossier de la page du site Internet d’IG correspondant à l’onglet « Conditions sprint markets » comporte d’abord six lignes de texte, dont la dernière indique « Produit présentant un fort risque de perte en capital ». Immédiatement après ces éléments figure un encadré qui répond en six points à la question « Pourquoi trader les Sprint markets ? », dont le premier est ainsi rédigé : « Retour sur investissement important. Profits sur trades gagnants allant de 70 % à 90 % de votre prime » (en gras sur la page Internet). Est ensuite inséré un encadré sur le « Fonctionnement des Sprint markets » qui se termine par l’évocation d’une possible perte (« […] lorsque votre ordre arrive à échéance, notre système détermine automatiquement si vous avez réalisé un gain ou une perte ») ainsi qu’une mise en garde sur les risques de perte (« De par leurs échéances rapprochées, les options binaires permettent d’enregistrer des gains à court terme mais peuvent également entraîner des pertes. Bien que les options binaires soient des produits dont le risque est limité, veuillez noter qu’elles peuvent aboutir à des pertes conséquentes »). La mention « Retour sur investissement important », qui donne à penser que les opérations proposées dégageaient systématiquement un profit élevé, est trompeuse dès lors que, selon les calculs des contrôleurs, non contestés par IG, 84 % des clients de la succursale ayant réalisé de telles opérations entre janvier 2014 et juin 2015 avaient subi une perte cumulée de 1,2 million d’euros, tandis que les 16 % restants avaient perçu des - 15 - gains s’élevant à montant total de 0,1 million d’euros, soit une probabilité très forte de réaliser une opération perdante. La qualité de l’information fournie sur un site Internet devant, comme il a été dit, s’apprécier au regard du contenu de chaque page, il est indifférent que les pages du site Internet d’IG relatives aux options binaires et au trading des options binaires fassent état de la possibilité de subir des pertes importantes. La mention litigieuse, mise en exergue par sa place dans la page Internet examinée et, surtout, sa mise en gras, était susceptible d’induire les clients en erreur sur le risque de perte encouru en dépit des indications claires données sur ce point à d’autres endroits de la même page. Il s’ensuit que l’information fournie par la page en cause du site Internet d’IG revêtait un caractère trompeur. Dès lors, il est établi qu’IG a manqué, d’une part, à l’obligation de communiquer à ses clients une information présentant un contenu exact, clair et non trompeur, prévue aux articles L. 533-12, I, du code monétaire et financier et 314-10, alinéa 1, du règlement général de l’AMF, d’autre part, à l’obligation de délivrer aux clients une information appropriée et compréhensible sur les risques inhérents à l’investissement dans les instruments financiers proposés, prévue à l’article 314-18 du règlement général de l’AMF. III. Sur les « insuffisances relatives à l’évaluation du caractère approprié du service à fournir au client » Les manquements notifiés comportent deux aspects qui seront examinés successivement. III.1. Sur l’absence d’informations nécessaires à une bonne évaluation du niveau de connaissances et d’expérience des clients de la succursale La notification de griefs reproche à IG de ne pas avoir demandé au client les informations nécessaires afin de pouvoir vérifier le niveau de connaissance et d’expérience du client en matière d’investissement. En ce sens, elle relève que l’évaluation des connaissances et de l’expérience du prospect reposait sur une seule question succincte et que les questions posées sur la fréquence des transactions réalisées par les clients laissaient une part importante à l’auto-évaluation en proposant des réponses peu précises et subjectives, ce dont elle déduit un manquement au II de l’article L. 533-13 du code monétaire et financier et à l’article 314-49 du règlement général de l’AMF, complétés par la position AMF n° 2013-02. Elle ajoute que les clients n’étaient pas interrogés sur le sens des transactions réalisées (achat ou vente) ni sur leur volume, en violation de l’article 314-51 du règlement général de l’AMF. IG considère que le questionnaire soumis à ses clients était conforme à la réglementation. Elle fait valoir, en particulier, que la question posée sur la fréquence des opérations réalisées par les clients par type d’instrument financier sur les trois dernières années permettait d’apprécier indirectement les volumes traités par eux grâce aux réponses proposées (« jamais », « rarement », « parfois » et « souvent »), que le questionnaire privilégiait des critères ciblés pour une personne déjà intervenue sur des produits avec effet de levier de type CFD et que les questions posées ne favorisaient pas l’autoévaluation des clients. Elle précise avoir néanmoins pris en compte les constats des contrôleurs en apportant des modifications au questionnaire. Sur les textes applicables Les faits reprochés, qui se sont déroulés entre septembre 2013 et mars 2016, seront examinés au regard des textes alors applicables, sous réserve de l’application rétroactive de dispositions plus douces entrées en vigueur postérieurement. - 16 - er Le II de l’article L. 533-13 du code monétaire et financier, dans sa version en vigueur du 1 novembre 2007 au 2 janvier 2018, disposait : « II – En vue de fournir un service autre que le conseil en investissement ou la gestion de portefeuille pour le compte de tiers, les prestataires de services d’investissement demandent à leurs clients, notamment leurs clients potentiels, des informations sur leurs connaissances et leur expérience en matière d’investissement, pour être en mesure de déterminer si le service ou le produit proposés aux clients ou demandés par ceux-ci leur conviennent. / Lorsque les clients, notamment les clients potentiels, ne communiquent pas les informations nécessaires ou lorsque les prestataires estiment, sur la base des informations fournies, que le service ou l’instrument ne sont pas adaptés, les prestataires mettent en garde ces clients, préalablement à la fourniture du service dont il s’agit ». Dans sa version entrée en vigueur le 3 janvier 2018, le II du même article prévoit : « II – En vue de fournir un service autre que ceux mentionnés au I, les prestataires de services d’investissement autres que les sociétés de gestion de portefeuille demandent à leurs clients, notamment leurs clients potentiels, des informations sur leurs connaissances et leur expérience en matière d’investissement, en rapport avec le type spécifique d’instrument financier ou de service proposé ou demandé, pour être en mesure de déterminer si le service ou le l’instrument financier est approprié. / Lorsqu’une offre groupée de services ou de produits au sens de l’article L. 533-12-1 est envisagée, l’évaluation porte sur le caractère approprié de l’offre groupée dans son ensemble. / Lorsque les prestataires de services d’investissement autres que les sociétés de gestion de portefeuille estiment, sur la base des informations fournies, que le service ou l’instrument financier n’est pas adapté aux clients, notamment aux clients potentiels, ils les en avertissent. Cet avertissement peut être transmis sous une forme normalisée dans des conditions fixées par le règlement général de l’Autorité des marchés financiers. / Si les clients, notamment les clients potentiels, ne fournissent pas les informations mentionnées au premier alinéa ou si les informations fournies sont insuffisantes, les prestataires les avertissent qu’ils ne sont pas en mesure de déterminer si le service ou l’instrument financier envisagé leur convient. Cet avertissement peut être transmis sous une forme normalisée dans des conditions fixées par le règlement général de l’Autorité des marchés financiers ». Le champ d’application du II précité n’a pas été modifié avec l’entrée en vigueur de sa nouvelle version dès lors que la gestion de portefeuille pour compte de tiers et le conseil en investissement, exclus par renvoi aux services mentionnés au I, l’étaient déjà dans la version précédente. Quant aux obligations édictées par les deux versions, elles le sont dans des termes équivalents, sauf à relever que la version la plus récente traite du cas spécifique des offres groupées. Ainsi, en l’absence de disposition plus douce susceptible de recevoir une application rétroactive, il y a lieu d’examiner les faits au regard du II de l’article L. 533-13 du code monétaire et financier, dans sa version en vigueur à l’époque des faits. L’article 314-49 du règlement général de l’AMF, dans sa version en vigueur entre le 21 octobre 2011 et le 2 janvier 2018, disposait : « Afin de procéder à l’évaluation mentionnée au II de l’article L. 533-13 du code monétaire et financier, le prestataire de services d’investissement vérifie si le client possède le niveau d’expérience et de connaissance requis pour appréhender les risques inhérents à l’instrument financier ou au service d’investissement proposé ou demandé ». Le 3 janvier 2018, l’article 314-49 a été abrogé et le règlement délégué 2017/565 du 25 avril 2016 pris en application de la directive MIF II est entré en vigueur, notamment son article 56 qui dispose, en son 1. : « 1. Les entreprises d’investissement déterminent si leur client possède le niveau d’expérience et de connaissance requis pour appréhender les risques inhérents au produit ou au service d’investissement proposé ou demandé lorsqu’elles évaluent le caractère approprié pour un client d’un service d’investissement conformément à l’article 25, paragraphe 3 de la directive 2014/65/UE ». Ces dispositions sont équivalentes à celles précitées de l’article 314-49 du règlement général de l’AMF, de sorte que c’est à la lumière de ce dernier texte, dans sa version en vigueur à l’époque des faits, que le manquement sera examiné. L’article 314-51 du règlement général de l’AMF, dans sa version en vigueur entre le 21 octobre 2011 et le 2 janvier 2018, énonçait : « Les renseignements […] concernant la connaissance et l’expérience d’un client en - 17 - matière d’investissement incluent les informations suivantes, dans la mesure où elles sont appropriées au regard de la nature du client, de la nature et de l’étendue du service à fournir et du type d’instrument financier ou de transaction envisagé, ainsi que de la complexité et des risques inhérents audit service : 1° Les types de services, transactions et instruments financiers qui sont familiers au client ; 2° La nature, le volume et la fréquence des transactions sur instruments financiers réalisées par le client, ainsi que la période durant laquelle ces transactions ont eu lieu ; 3° Le niveau de connaissance et la profession ou, si elle est pertinente, l’expérience professionnelle du client ». Le 3 janvier 2018, l’article 314-51 a été abrogé et le règlement délégué précité du 25 avril 2016, notamment son article 55 qui prévoit, en son 1. : « 1. Les entreprises d’investissement veillent à ce que les renseignements concernant la connaissance et l’expérience d’un client ou client potentiel dans le domaine de l’investissement incluent les informations suivantes, dans la mesure où elles sont appropriées au regard de la nature du client, de la nature et de la portée du service à fournir et du type de produit ou de transaction envisagé, ainsi que de la complexité et des risques inhérents audit service : a) Les types de services, de transactions et d’instruments financiers que le client connaît bien. b) La nature, le volume et la fréquence des transactions sur des instruments financiers réalisées par le client, ainsi que la longueur de la période durant laquelle il a effectué ses transactions. c) Le niveau d’éducation et la profession ou, si elle est pertinente, l’ancienne profession du client ou client potentiel ». Ces dispositions sont équivalentes à celles précitées de l’article 314-51 du règlement général de l’AMF, de sorte que c’est à la lumière de ce dernier texte, dans sa version en vigueur à l’époque des faits, que le manquement sera examiné. Sur l’examen du grief La procédure datée de septembre 2013 intitulée « IG Markets France and Luxembourg Account Opening Guide » établit qu’en France, les prospects se voyaient remettre un questionnaire destiné à évaluer l’adéquation de leurs connaissances et de leur expérience aux services proposés qui comportait trois questions. La première portait sur les types d’instruments financiers sur lesquels des transactions avaient été réalisées au cours des trois années précédentes ainsi que, par le biais des réponses proposées (« souvent », « parfois », « rarement/jamais »), leur fréquence, la deuxième sur les modes d’investissement (« investissement direct » / « compte géré ») et la troisième sur l’expérience ou les compétences ou formations spécifiques du client lui permettant de mieux comprendre les services d’IG (« oui » / « non »). Il en résulte qu’aucune question n’était posée ni sur le sens (achat/ vente) des transactions réalisées par les clients, ni, une telle information ne pouvant se déduire de manière fiable et précise d’une indication sur la fréquence de ces transactions, sur le volume de celles-ci. Ainsi, IG a méconnu le 2° de l’article 314-51 du règlement général de l’AMF. Par ailleurs, la mesure de la fréquence des transactions au moyen de trois niveaux non définis (« souvent », « parfois », « rarement/jamais »), imprécise, permettait d’autant moins de connaître de manière exploitable l’expérience des clients en matière d’instruments financiers qu’elle reposait sur des distinctions dépendantes de l’appréciation subjective des clients interrogés. L’exigence de renseignement sur la fréquence des transactions sur des instruments financiers réalisées par le client, prévue par le 2° de l’article 314-51 du règlement général de l’AMF, n’est donc pas satisfaite. En outre, le choix de répondre « oui » ou « non » à la question interrogeant le client sur son expérience ou ses compétences ou formations spécifiques dépendait de l’appréciation portée par ce dernier, alors qu’aucune information objective sur ces trois points ne lui était par ailleurs demandée. Dès lors, IG n’a pas recueilli les éléments relatifs au niveau de connaissance et à la profession ou à l’expérience professionnelle du client prévus par le 3° de l’article 314-51 du règlement général de l’AMF. Enfin, il résulte de ce qui précède qu’IG disposait d’éléments lacunaires et imprécis ainsi que, pour certains d’entre eux, peu fiables car fondés sur une appréciation subjective, sur l’expérience et les connaissances de ses - 18 - clients en matière d’investissement. Il s’ensuit qu’IG n’était en mesure ni de vérifier si le client possédait le niveau d’expérience et de connaissance requis pour appréhender les risques inhérents à l’instrument financier ou au service d’investissement proposé ou demandé, en violation de l’article 314-49 du règlement général de l’AMF, ni de déterminer si le service ou le produit proposés aux clients ou demandés par eux leur convenaient, en violation du II de l’article L. 533-13 du code monétaire et financier. III.2. Sur l’absence de mise à jour des informations relatives aux clients de la succursale La notification de griefs relève qu’IG ne s’assurait pas de la mise à jour des dossiers des clients alors que certains d’entre eux avaient ouvert leur compte plusieurs années auparavant ou réactivaient un compte inutilisé pendant une longue durée. Elle en déduit qu’IG s’est fondée, pour déterminer le caractère approprié du service qu’elle fournissait, sur des informations manifestement périmées ou incomplètes, en violation de l’article 314-53 du règlement général de l’AMF. IG conteste le manquement. Elle soutient que, dans l’hypothèse où les clients sont actifs pendant au moins deux ans, leur expérience sur les dérivés OTC n’a pu que s’accroître depuis l’ouverture de leur compte, de sorte que la mise à jour des informations relatives aux connaissances et à l’expérience des clients n’est pas nécessaire. Elle ajoute que sa procédure interne prévoit qu’un client inactif pendant deux ans qui souhaiterait redevenir actif doit redonner les informations nécessaires à la vérification du caractère approprié du service fourni et qu’une nouvelle évaluation est également effectuée lorsqu’un client actif souhaite ouvrir un compte supplémentaire. Enfin, elle soutient disposer d’une connaissance actualisée de la situation financière de ses clients lui permettant de réapprécier le caractère approprié du service fourni grâce à la mise à jour demandée au client à chaque date anniversaire de l’ouverture de son compte lors de la connexion au site Internet qui porte, notamment, sur les données relatives à sa situation financière (revenu annuel, valeur du portefeuille, origine des fonds, niveau de patrimoine). Sur le texte applicable Les faits reprochés, qui se sont déroulés entre juin 2015 et mars 2016, seront examinés au regard des textes alors applicables, sous réserve de l’application rétroactive de dispositions plus douces entrées en vigueur postérieurement. L’article 314-53 du règlement général de l’AMF, dans sa version en vigueur entre le 21 octobre 2011 et le 2 janvier 2018, disposait : « Le prestataire de services d’investissement est habilité à se fonder sur les informations fournies par ses clients, à moins qu’il ne sache, ou ne soit en situation de savoir, que celles-ci sont manifestement périmées, erronées ou incomplète ». Le 3 janvier 2018, l’article 314-53 a été abrogé et le règlement délégué 2017/565 du 25 avril 2016 pris en application de la directive MIF II est entré en vigueur, notamment son article 55 qui dispose, en son 3. : « 3. Une entreprise d’investissement est habilitée à se fonder sur les informations fournies par ses clients ou clients potentiels, à moins qu’elle n’ait connaissance du fait que celles-ci sont manifestement périmées, erronées ou incomplètes, ou qu’elle devrait avoir connaissance de ce fait ». Ces dernières dispositions sont équivalentes à celles précitées de l’article 314-53 du règlement général de l’AMF, de sorte que le manquement sera examiné à la lumière de cet article dans sa version en vigueur à l’époque des faits. - 19 - Sur l’examen du grief Il résulte des éléments relevés dans la notification de griefs et du texte invoqué que, selon la poursuite, à défaut de s’être assurée de la mise à jour des dossiers clients, IG savait ou était en situation de savoir que les informations fournies par ses clients étaient manifestement périmées et, partant, n’était pas habilitée à se fonder sur celles-ci. La caractérisation du manquement suppose, comme l’exige l’article 314-53 du règlement général de l’AMF, que les informations fournies par les clients soient « manifestement périmées ». Or, cette péremption manifeste, qui ne se déduit pas de la seule absence de mise à jour des informations alléguée par la poursuite et ne ressort pas des pièces du dossier, n’est pas établie. Le manquement d’IG à l’article 314-53 du règlement général de l’AMF n’est donc pas constitué. IV. Sur « le manque de diligence à l’égard de l’AMF » La notification de griefs relève que le délai moyen de transmission des documents répondant aux demandes de la mission de contrôle a été de 40 jours, alors que la succursale était censée en détenir la plupart, comme par exemple la décomposition du résultat de celle-ci par activité pour les années 2013 et 2014, demandée le 25 juin 2015 et qui a fait l’objet d’une réponse partielle en octobre 2015 après quatre relances adressées les 13 juillet, 17 juillet, 14 octobre et 24 novembre 2015. Elle fait également état du délai de près de huit mois ayant séparé la demande, le 6 août 2015, et la transmission, le 14 avril 2016, de la convention d’ouverture de compte courant conclue entre IG et un établissement de crédit qui a conduit à ce que le document soit reçu après l’envoi du rapport de contrôle à IG. Elle ajoute que malgré « ces délais conséquents », IG a transmis « certains documents ou réponses de mauvaise qualité, incomplets, ou présentant d’autres anomalies les rendant inexploitables ou difficiles à exploiter » et cite à cet égard un document au format « pdf » comportant des marques de révision rendant sa lecture difficile, les incohérences affectant certaines réponses et documents ou encore un rapport annuel et des rapports de gestion non signés par le conseil d’administration et les commissaires aux comptes. Elle en déduit qu’IG n’a pas veillé à ce que les demandes d’information « soient satisfaites dans des délais raisonnables » et, partant, n’a pas apporté « son concours de façon diligente » à la mission de contrôle, en violation de l’article 143-3, alinéa 3, du règlement général de l’AMF. IG reconnaît les délais de réponse mentionnés par la notification de griefs, qu’elle regrette, mais soutient qu’ils ne témoignent pas d’un manque de diligence et de loyauté et fait valoir à cet égard qu’elle a considéré le contrôle de l’AMF comme prioritaire et mis en place une équipe dédiée au traitement des demandes sous la supervision directe du directeur de la succursale. Elle explique les délais de réponse par des difficultés pratiques ainsi que par le volume de certains documents demandés et le temps de traitement nécessaire à leur fourniture en donnant l’exemple du fichier recensant les milliers de clients actifs de la succursale, qui a dû être extrait du « fichier central CRM » d’IG à Londres et a nécessité une conversion au format « excel ». S’agissant plus particulièrement de l’envoi tardif de la convention d’ouverture de compte, IG indique que l’établissement de crédit concerné n’a pu fournir qu’une attestation, transmise à la mission de contrôle, et non la convention d’origine et qu’une nouvelle convention a dû être conclue le 20 janvier 2016. Elle rappelle également que le contrôle a débuté peu de temps avant les vacances estivales, période pendant laquelle les capacités de réponse de la succursale, dont l’effectif est réduit, ont été affectées. - 20 - Elle ajoute que l’envoi d’un document « pdf » en version non finale relève d’un oubli d’acception des marques de révision qui n’a pas empêché la mission de contrôle de vérifier la procédure prévue par ce document, sans qu’aucun défaut de conformité ne soit relevé, que la transmission de rapports de gestion non signés par le conseil d’administration et les commissaires aux comptes résulte d’une mauvaise compréhension de l’objet de la demande, ceux des années 2013 et 2014, datés et signés, étant au demeurant disponibles sur son site, et que la traduction française du rapport annuel du Groupe IG transmise au greffe pour publication n’est jamais signée. En conclusion, IG fait état de « sa volonté continue de coopérer et de maintenir de bonnes relations avec les autorités de supervision » et indique avoir, « à cette fin, réorganisé et restructuré son équipe de conformité et contrôle interne » en relation avec l’AMF. Sur le texte applicable Les faits reprochés se déroulés entre juin 2015 et mars 2016. L’article 143-3, alinéa 3, du règlement général de l’AMF, dans sa version en vigueur depuis le 15 juin 2014, dispose : « Les personnes contrôlées apportent leur concours avec diligence et loyauté ». Sur l’examen du grief L’article 143-3, alinéa 3, du règlement général de l’AMF érige en obligation professionnelle applicable à toute personne contrôlée le fait d’apporter son concours avec diligence et loyauté à la mission de contrôle de l’AMF. Il ressort d’une fiche établie par les contrôleurs, dont les indications n’ont pas été contestées par IG, qu’entre le 25 juin 2015 et le 27 janvier 2016, ces derniers ont formulé 60 demandes auxquelles il a été répondu dans un délai moyen de 40 jours calendaires. Le délai a dépassé 20 jours dans 33 cas, 40 jours dans 22 cas, 100 jours dans 9 cas et plus de 60 relances ont été adressées. Par ailleurs, il est établi par les pièces du dossier, notamment les courriels adressés par le compliance officer de la succursale aux contrôleurs, que, comme le relève le rapport de contrôle, les délais d’envoi annoncés par IG elle-même n’ont, dans un certain nombre de cas, pas été respectés. Ainsi, l’indication donnée dans un courriel du 29 juin 2015 selon laquelle les éléments demandés seraient adressés « dès demain pour la plupart » s’est traduite par un premier envoi du 17 juillet 2015, l’annonce par courriel du 27 octobre 2015 d’une transmission d’éléments « sous peu » a donné lieu à des envois le 10 novembre 2015 puis entre les 23 et 27 novembre 2015 et l’affirmation par courriel du 16 décembre 2015 d’un retour rapide sur une question posée n’a pas été suivie d’effet. Un procès-verbal de constat du 26 novembre 2015 signé par le directeur général adjoint des succursales France et Luxembourg d’IG comporte un tableau qui recense 9 demandes formulées entre le 25 juin et le 27 octobre 2015 dont les contrôleurs considéraient qu’elles n’avaient toujours pas été satisfaites, en tout ou partie, à la date du constat. Ces demandes concernent le résultat par activité pour 2013 et 2014, les deux derniers rapports de gestion, la balance comptable 2014, la liste des transactions réalisées en 2014, la convention d’ouverture de compte conclue entre un établissement de crédit et IG, deux listes des clients figurant dans l’outil Salesforce assorties d’un certain nombre de champs, la copie de 22 procurations/mandats donnés par les clients et les éléments chiffrés relatifs aux 4 apporteurs d’affaires. Interrogé sur ce tableau, qui répertoriait également les difficultés rencontrées, le directeur général adjoint s’est contenté de répondre que le compliance officer transmettrait les éléments de réponse et de précision sur les différents points mentionnés au plus tard le 27 novembre 2015. Pour expliquer les délais de réponse, IG se borne à invoquer la période des congés d’été, la complexité d’obtention de « certains » documents demandés en raison de leur taille et l’incapacité de l’établissement de crédit concerné à fournir la convention d’ouverture de compte. Les demandes de la mission de contrôle s’étant échelonnées entre le 25 juin 2015 et le 27 janvier 2016, l’argument tiré des congés d’été a une portée limitée. - 21 - Ensuite, le seul exemple fourni par IG quant aux difficultés techniques rencontrées est celui du fichier des clients couverts par la succursale. Or, sur le délai de 50 jours écoulé entre la demande et la dernière réponse, 28 jours sont imputables, non à une difficulté d’extraction des éléments, mais au fait que la première version du document adressée avait été anonymisée et ce, en toute connaissance de cause comme en atteste un courriel du compliance officer du 5 août 2015 interrogeant les contrôleurs sur la justification de leur demande d’indication du nom des clients. Quant à la demande de communication de la convention d’ouverture de compte formulée le 6 août 2015, il y a été répondu, le 14 octobre 2015, par l’envoi d’une lettre du 9 mai 2008 écrite à IG par l’établissement de crédit concerné attestant de certaines modalités de fonctionnement du compte ouvert dans ses livres pour la succursale française. Le jour de la réception de ce document, les contrôleurs ont fait savoir par courriel qu’il ne s’agissait pas d’une convention. En réponse, il leur a été indiqué, par courriel du 16 octobre 2015, qu’une demande avait été adressée au siège de Londres. Entendu par les contrôleurs le 19 janvier 2016, le directeur général adjoint des succursales France et Luxembourg d’IG a déclaré qu’il ne comprenait pas pourquoi la convention n’avait pas encore été transmise. Ce n’est qu’après la fin des opérations de contrôle, le 14 avril 2016, qu’une convention conclue le 20 janvier 2016 a été communiquée. A supposer établie l’incapacité alléguée de fournir la convention, il reste que la demande des contrôleurs est restée sans réponse pendant plus de deux mois puis a donné lieu, successivement, à l’envoi d’un document n’y satisfaisant manifestement pas et à une réponse d’attente non suivie d’effet sans qu’aucune explication ne soit fournie jusqu’à la communication, plus de huit mois après, d’une nouvelle convention. Il convient également de relever que, selon les propres affirmations d’IG, les rapports de gestion signés de 2013 et 2014 étaient disponibles sur son site Internet, de sorte que le délai de transmission de 173 jours, dont 133 jours correspondant au temps écoulé entre la demande d’envoi et la réception de versions signées (les premières adressées ne l’étant pas), est injustifiable. Il est établi par l’ensemble des éléments qui précèdent qu’IG n’a pas apporté son concours avec diligence lors du contrôle diligenté par l’AMF, violant ainsi l’article 143-3, alinéa 3, du règlement général de l’AMF. - 22 - SANCTION ET PUBLICATION Le II a) de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier, dans sa version en vigueur depuis le 26 juillet 2013, non modifiée depuis sur ces points dans un sens moins sévère, dispose : « II. La commission des sanctions peut, après une procédure contradictoire, prononcer une sanction à l’encontre des personnes suivantes : a) Les personnes mentionnées aux 1° […] du II de l’article L. 621-9, au titre de tout manquement à leurs obligations professionnelles définies par les règlements européens, les lois, règlements et règles professionnelles approuvées par l’Autorité des marchés financiers en vigueur […] ». Le 1° du II de l’article L. 621-9, auquel renvoie les dispositions précitées, mentionne notamment les prestataires de services d’investissement agréés ou exerçant leur activité en libre établissement en France. Le III a) de l’article L. 621-15 du même code, dans la même version, également non modifiée depuis sur ces points dans un sens moins sévère, prévoit que les sanctions applicables sont : « a) Pour les personnes mentionnées au 1° […] du II de l’article L. 621-9, l’avertissement, le blâme, l’interdiction à titre temporaire ou définitif de l’exercice de tout ou partie des services fournis, la radiation du registre mentionné à l’article L. 546-1 ; la commission des sanctions peut prononcer soit à la place, soit en sus de ces sanctions une sanction pécuniaire dont le montant ne peut être supérieur à 100 millions d’euros ou au décuple du montant des profits éventuellement réalisés […] ». Il en résulte qu’IG encourt l’une des sanctions disciplinaires mentionnées au III a) de l’article L. 621-15 et, en sus ou à la place, une sanction pécuniaire d’un montant maximum de 100 millions d’euros. Le III ter de l’article L. 621-15 du même code, dans sa version en vigueur depuis le 11 décembre 2016, précise en ces termes les éléments à prendre en compte pour déterminer la sanction : « Dans la mise en œuvre des sanctions mentionnées aux III et III bis, il est tenu compte notamment : / - de la gravité et de la durée du manquement ; / - de la qualité et du degré d’implication de la personne en cause ; / - de la situation et de la capacité financière de la personne en cause, au vu notamment de son patrimoine et, […] s’agissant d’une personne morale de son chiffre d’affaires total ; / - de l’importance soit des gains ou avantages obtenus, soit des pertes ou coûts évités par la personne en cause, dans la mesure où ils peuvent être déterminés ; / - des pertes subies par des tiers du fait du manquement, dans la mesure où elles peuvent être déterminées ; / - du degré de coopération avec l’Autorité des marchés financiers dont a fait preuve la personne en cause, sans préjudice de la nécessité de veiller à la restitution de l’avantage retiré par cette personne ; / - des manquements commis précédemment par la personne en cause ; / - de toute circonstance propre à la personne en cause, notamment des mesures prises par elle pour remédier aux dysfonctionnements constatés, provoqués par le manquement qui lui est imputable et le cas échéant pour réparer les préjudices causés aux tiers, ainsi que pour éviter toute réitération du manquement ». Les manquements retenus sont multiples et d’une particulière gravité au regard de la clientèle à laquelle s’adresse la succursale, composée presqu’exclusivement de particuliers, des canaux de commercialisation utilisés, notamment Internet, qui rendent les produits proposés directement et facilement accessibles et des risques financiers attachés à ces produits en raison de leur effet de levier. Toutefois, IG a pris de nombreuses mesures correctives à la suite du contrôle de l’AMF et la suppression de l’accès aux CFD sur sprint markets pour la clientèle française. Il résulte des éléments financiers transmis par IG que cette dernière a perçu des revenus de négociation de 287 millions de livres sterling et dégagé un résultat net de 101,6 millions de livres sterling au titre de l’exercice clos le 31 mai 2017. En considération de ces éléments, il sera prononcé à l’encontre d’IG une sanction pécuniaire de 500 000 euros. Le V de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier, dans sa version modifiée par l’ordonnance du 22 juin 2017, dispose : « V. - La décision de la commission des sanctions est rendue publique dans les publications, journaux ou supports qu'elle désigne, dans un format proportionné à la faute commise et à la sanction infligée. Les frais sont supportés par les personnes sanctionnées. La commission des sanctions peut - 23 - décider de reporter la publication d'une décision ou de publier cette dernière sous une forme anonymisée ou de ne pas la publier dans l'une ou l'autre des circonstances suivantes : a) Lorsque la publication de la décision est susceptible de causer à la personne en cause un préjudice grave et disproportionné, notamment, dans le cas d'une sanction infligée à une personne physique, lorsque la publication inclut des données personnelles ; b) Lorsque la publication serait de nature à perturber gravement la stabilité du système financier, de même que le déroulement d'une enquête ou d'un contrôle en cours. […] ». La publication de la présente décision n’est ni susceptible de causer à IG un préjudice grave et disproportionné, ni de nature à perturber gravement la stabilité du système financier ou le déroulement d’une enquête ou d’un contrôle en cours. Elle sera donc ordonnée, sans anonymisation. PAR CES MOTIFS, Et ainsi qu’il en a été délibéré sous la présidence de M. Jean Gaeremynck, en remplacement de Mme Marie-Hélène Tric, présidente de la Commission des sanctions, par Mme Sophie Schiller et ère MM. Bruno Gizard et Miriasi Thouch, membres de la 1 section de la Commission des sanctions, et ème M. Didier Guérin, membre de la 2 section, suppléant Mme Edwige Belliard en application du I de l’article R. 621-7 du code monétaire et financier, en présence de la secrétaire de séance, la Commission des sanctions : - prononce à l’encontre de la société IG Markets Limited une sanction pécuniaire de 500 000 € (cinq cent mille euros) ; - ordonne la publication de la présente décision sur le site Internet de l’Autorité des marchés financiers et fixe à 5 ans à compter de la date de la présente décision la durée de son maintien en ligne de manière non anonyme. Fait à Paris, le 25 juin 2018, La Secrétaire de séance, Le Président, Anne Vauthier Jean Gaeremynck Cette décision peut faire l’objet d’un recours dans les conditions prévues à l’article R. 621-44 du code monétaire et financier.